TraAM : une visite au musée avec des élèves allophones
Cette proposition d'Agnès Jung-Arescaldino (professeur d'Histoire-géographie, lycée Libergier, Reims) concerne des élèves de lycée (seconde et première générale, technologique et professionnelle) regroupés au sein d'une UPE2A et préparant, soit le Delf niveau A2, soit le Delf niveau B1. Il s'agissait d'allier interculturel (découverte d’un mouvement artistique occidental) et accès à une culture disciplinaire (histoire, histoire des arts) via le lexique et les méthodes de la discipline. Le scénario a pour objectifs de situer une œuvre d’art dans le temps et l’espace, de faire utiliser le vocabulaire nécessaire pour décrire une œuvre d’art, de permettre aux élèves d'exprimer un point de vue, une sensibilité, bref de s'exprimer en continu à partir d’un document déclencheur.
Les tableaux choisis (photo A. Jung-Arescaldino)
Compétences particulièrement travaillées
Organiser et synthétiser des informations
Développer une culture de la sensibilité
Développer son expression personnelle
Utiliser les TIC
Hypothèses
Produire un texte à l’oral
Écouter son propre texte et en corriger la structure et la prononciation au besoin
Comprendre un support audio produit par autrui
Conserver la trace de son niveau à un moment donné et mesurer ses progrès dans la maîtrise du français (FLS)
Mise en œuvre pratique
Séquence en 6 h combinant travail en autonomie et travail en grand groupe. Le professeur de Lettres intervenant dans l'UPE2A a participé au projet en accompagnant les élèves au musée et en travaillant leur premier jet pour Photorécit.
Différenciation (temps de parole, utilisation ou non de supports - lexique, outils linguistiques comme structures ou amorces de phrases).
Exprimer son ressenti (photo A. Jung-Arescaldino)
- Séance 1 : Une séance préparatoire à la visite au musée a permis d'exprimer son ressenti personnel : en utilisant le tableau de F. Kahlo, Autoportrait à la frontière entre le Mexique et les Etats-Unis (1932), les élèves ont exprimé leur ressenti et découvert certaines amorces de phrases. Le choix du support permet de faire écho à des situations personnelles et/ou à évoquer les difficultés d'un migrant tiraillé entre deux pays.
- Séance 2 : Visite au musée des Beaux-Arts (choix libre d’un tableau par l’élève, baladeur pour enregistrer ses premières impressions). A l'issue de la visite, le professeur récupère les fichiers son et relève les références des œuvres choisies.
- Séance 3 : En classe, les élèves disposent d'outils linguistiques à la demande (lexique, amorces de phrases, ...) pour faire une description outillée de l’œuvre choisie. Ils peuvent s'enregistrer ou prendre des notes en vue de la réalisation du photorécit. Ce travail est fait conjointement avec le professeur de Lettres inervenant dans l'UPE2A.
- Séance 4 : En salle informatique, les élèves réalisent un photorécit simple (1 diapo – un son).
- Séance 5 : En classe, chaque photorécit est écouté par l'ensemble de la classe, une frise commune est complétée et affichée dans la salle.
- Action des élèves - mise en apprentissage de la compétence
Lors de la visite au musée des Beaux-Arts, les élèves produisent un premier son avec des amorces de phrases simples (j'aime, je n'aime pas...). Il s'agit dans un premier temps de développer une culture de la sensibilité et de développer son expression personnelle. Le baladeur permet à la fois l'enregistrement et l'écoute. Une fois en classe, les élèves peuvent écouter leur premier son et l'étoffer grâce à des outils linguistiques. Ils peuvent à la fois améliorer leur production orale sur la forme (outils linguistiques à la demande) et sur le fond (fiche guidant la description) : ce travail se fait en utilisant le brouillon et le baladeur, permettant l'écoute et le re-jeu pour améliorer structure et prononciation. Certains ont poursuivi ce travail à la maison. En salle informatique, les élèves finalisent cette production au moyen de Photorécit – le moyen pour les élèves aussi de se familiariser avec un environnement numérique. La dernière séance permet de confronter son travail à celui des autres. C'est la compréhension orale de chaque élève qui est ici travaillée.
- Action de l'enseignant
Lors de la visite au musée des Beaux-Arts, les deux enseignantes font découvrir aux élèves allophones une structure culturelle avec l'aide du professeur ressource du service éducatif (présentation des grandes oeuvres, genres/mouvements sont abordés). Les enseignantes accompagnent la visite et relèvent les tableaux choisis (photo). Elles montrent aux élèves les manipulations nécessaires pour le baladeur. Une des enseignantes récupère les premiers sons. La séance 3 est anticipée en produisant des fiches ressources.
Lors du temps de rédaction préparatoire au photorécit, le professeur circule parmi les élèves et les guide au besoin dans un souci de différenciation (utilisation ou non de supports - lexique, outils linguistiques comme structures ou amorces de phrases). Il récupère les sons et les brouillons afin de faire une correction du premier jet.
Pour la séance 4, le professeur montre dans un temps magistral l'environnement numérique et les manipulations nécessaires pour Photorécit. Il circule parmi les élèves pour les aider au besoin. Il récupère les photorécits en fin de séance. Lors de la dernière séance, le professeur projette les différents photorécits. Élèves et enseignant co-évaluent les réalisations. L'enseignant a préparé en amont la frise avec Frisechronos (http://www.frisechronos.fr/) :
Bilan, obstacles et modifications possibles
Un certain nombre d'obstacles peuvent être anticipés :
- Des obstacles techniques (baladeur MP3 / téléphones)
- Des obstacles organisationnels (dans le cadre de l'UP2A, l'assiduité des élèves est assez aléatoire)
- Des obstacles didactiques (pré-requis culturels nécessaires pour appréhender des œuvres d'art, l'anticipation des outils linguistiques à fournir).
L'intérêt du numérique est réel : produire un texte à l’oral et écouter son propre texte et en corriger la structure et la prononciation au besoin. Pour l'élève, l'activité permet aussi d'écouter et de comprendre un support audio produit par autrui. Pour l'enseignant, c'est l'opportunité de conserver la trace de son niveau à un moment donné et mesurer les progrès des élèves dans la maîtrise du FLS. Lors de la séance consacrée à Photorécit, une plus-value non anticipée a été observée : les élèves ont modifié leur brouillon en allant chercher dans Google traduction des éléments qui leur manquaient.
Pour autant, ces outils numériques ont posé problème. Les élèves de l’UPE2A ont une très grande hétérogénéité quant aux compétences numériques. Les baladeurs MP3 sont des objets absolument pas familiers aux élèves de l'UPE2A. Il a fallu montrer à chacun d’eux les manipulations de base. Avec cet outil, les élèves ne disposaient plus chez eux du premier enregistrement : le téléphone aurait été plus pertinent pour se réécouter en dehors de la séance. De même, deux heures ont été nécessaires en réalité pour Photorécit au lieu d'une. Il y a eu une réelle surcharge cognitive pour les élèves qui découvraient le logiciel (brancher le casque-micro, aller chercher l’image, comprendre comment fonctionne le logiciel…). La deuxième heure a permis de finaliser les enregistrements. La découverte des outils prend du temps, un temps incompressible et nécessaire si l’on veut ensuite se concentrer sur les apprentissages à réaliser. En outre, certains élèves n’aiment pas s’entendre parler (chuchotis) et ont du mal à passer le cap pour s’enregistrer une nouvelle fois pour améliorer leur prestation orale alors qu’une élève s’est enregistrée plusieurs fois dans la séance, parlant de plus en plus vite. Notons toutefois qu'une élève a énormément investi la tâche : deux enregistrements pour deux tableaux différents lors de la deuxième séance en salle informatique. Elle avait beaucoup investi la tâche préparatoire en dehors du temps de classe en rédigeant pour s'enregistrer. Certains élèves n'ont pas été au bout du projet car ils étaient absents lors des séances 4 et 5.
La différenciation s'est faite au cours de la réalisation (étayage au cours de réalisation du photorécit) et sur la production (durée d'enregistrement plus ou moins longue).
C’est la visite du musée plus que l’enregistrement au moyen du baladeur ou la réalisation d’un photorécit qui marque les élèves. D'ailleurs, les élèves ont été capables de restituer de nombreux éléments lors de la séance suivante, une semaine après, comme le montre la photo ci-dessous:
Trois élèves (niveau B1) ont noté au tableau ce qu'ils avaient mémorisé lors de la visite au musée ;
en rouge, la reprise par l'enseignant. (photo A. Jung-Arescaldino).
Ressources et outils numériques mobilisés
Baladeur MP3
Photorécit
Productions d’élèves
Sons pris au musée : exemple 1 exemple 2
Photorécits : exemple 1 exemple 2
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Créé lejeudi 2 mai 2019
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RédacteurJung-Arescaldino Agnès
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Dernière mise à jourdimanche 16 juin 2019