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Le monument aux infirmières
de Reims

 présenté par Jean-Pierre HUSSON

Juliette Adam et le Comité d'honneur du monument

Le choix de Reims et de l'emplacement du monument dans la ville

L'inauguration du monument en 1924

La monument et ses inscriptions

La plaque commémorative du bombardement du 30 mai 1944
érigée par la Croix-Rouge

La tempête de 1999 et le ravalement de 2005

Le Livre d'Or des infirmières

Le monument aux infirmières de Pierrefonds

Le 90e anniversaire de l'armistice de 1918

Sources documentaires


Juliette Adam
et le Comité d'honneur du monument

    Le monument « à la gloire des infirmières françaises et alliées victimes de leur dévouement » érigé à Reims après la Première Guerre mondiale, a été financé par une souscription internationale lancée par un Comité d'honneur fondé et présidé par Juliette ADAM, et dont le secrétaire général était Auguste MAZURE.
   
Ce Comité
avait reçu le soutien
des plus hautes autorités de la République française et de nombreuses personnalités des pays alliés de la France pendant la Première Guerre mondiale.

   Née en 1836, Juliette LAMBER a épousé Édmond ADAM, député, puis sénateur de la Gauche républicaine. Amie de George SAND, Juliette ADAM a fondé en 1879 la Nouvelle Revue et ouvert boulevard Poissonnière à Paris, un salon politique et littéraire fréquenté par Léon GAMBETTA, Adolphe THIERS, Gabriel HANOTAUX, Georges CLEMENCEAU, Gustave FLAUBERT, Victor HUGO, Guy de MAUPASSANT, Ivan Serguïevitch TOURGENIEV, Pierre LOTI, Alexandre DUMAS fils et Léon DAUDET.
   Elle a écrit une cinquantaine d'ouvrages, romans, mémoires, reportages et réflexions politiques, et des centaines d'articles.

Juliette Adam photographiée par Nadar en 1896

   Fille de médecin, qui avait été soignée dans sa jeunesse pour une grave affection des voies respiratoires, avant de devenir une ardente militante de la cause féministe, puis une femme du monde célèbre, elle a voulu, devenue une dame âgée, mettre sa notoriété au service de ce qu’elle appelait l’Oeuvre. C’est ainsi qu’elle désignait le Comité pour l’érection du monument aux infirmières, afin de rendre hommage à toutes ces femmes qui avaient, au péril de leur vie, porté secours aux soldats blessés sur tous les fronts de la guerre de 1914 à 1918.

   L'exécution de ce monument a été confiée à l'architecte Charles GIRAULT, membre de l'Institut, et au sculpteur Denys PUECH, membre de l'Institut et directeur de l'Académie de France à Rome.


Le choix de Reims
et de l'emplacement du monument
dans la Ville de Reims

   Le 15 février 1922, M. LIÉNARD, au nom de la Commission de Reconstruction, donna lecture devant le Conseil municipal de Reims d'une lettre datée du 23 janvier 1922, par laquelle l'architecte et le sculpteur désignés par le Comité du Monument aux infirmières, informaient le maire de Reims que sa ville avait été choisie, parce qu'elle était « le point le plus favorable pour se souvenir de la Grande Guerre ».
  Ils demandaient qu'on leur fasse parvenir des plans de la Ville de Reims indiquant quelques emplacements possibles, et présentaient une photographie de la maquette du monument.
   Ce dernier,
d'une hauteur d'environ 5 mètres, se composerait « d'un fût circulaire portant un haut-relief ayant pour sujet une infirmière qui, après avoir donné les premiers soins à un blessé, le remet aux mains d'un major », et sur lequel il était prévu de graver « les noms des infirmières mortes aux Armées ».
   La Commission de Reconstruction
proposa au Conseil municipal d'offrir le square de l'esplanade Cérès, comme emplacement pour ériger ce monument.
   Le maire,
Charles ROCHE, regretta que la maquette ait été réalisée avant le choix de l'emplacement et demanda qu'une légère modification soit apportée au couronnement du monument.
   M. NOËL estima que le choix de l'emplacement n'était pas bon, que le monument serait mieux placé à l'entrée du cimetière de l'Est, et obtint un renvoi devant la Commission de Reconstruction.

   Des plans de la Ville de Reims furent envoyés à l'architecte GIRAULT, indiquant plusieurs emplacements possibles : le Cimetière de l'Est, l'esplanade Cérès, la place de la République, la Patte d'Oie.

   Le 3 mars 1922, l'architecte GIRAULT et le secrétaire général du Comité d'érection, Auguste MAZURE, se rendirent à Reims où il visitèrent les différents emplacements possibles, accompagné par le président de la Société des architectes de la Marne, M. ALLARD.
    À l'issue de cette visite, Charles GIRAULT informa le maire de Reims que l'emplacement du cimetière de l'Est était trop éloigné du centre de la Ville, et que le meilleur emplacement était l'esplanade Cérès :

   De tous ces emplacements, l'esplanade Cérès nous a paru le plus convenable, par sa forme, par la disposition des plantations autour du point central qui sera occupé par le monument, de sorte que tout en s'imposant aux regards des passants, il ne serait pas en contact immédiat avec la circulation, probablement intense à cet endroit.
   M. Puech, mon confrère, et moi, nous serons heureux d'apporter tous nos soins à l'édification, dans la ville de Reims, d'un monument digne des grands souvenirs qui s'y rattachent.

  Il reconnaissait en même temps que son projet pouvait être remanié en accord avec la situation du lieu choisi.

   Le 10 mars 1922, le Conseil municipal de Reims, par 17 voix contre 7, a adopté les conclusions du rapport de la Commission de Reconstruction, présenté par M. LIÉNARD, qui proposait d'offrir l'emplacement de l'Esplanade Cérès au Comité du Monument aux infirmières.


L'inauguration du monument
en 1924

   Malgré la ferme opposition de quelques conseillers municipaux, le monument aux infirmières a donc été finalement érigé au centre du Square de l'Esplanade Cérès.

   Il a été inauguré le 11 novembre 1924, en présence des autorités civiles et militaires de Reims, du cardinal LUÇON, archevêque de Reims, du pasteur GONIN, du rabbin HERMANN, du général PAU, président de la Croix-Rouge française, et d'une délégation des trois sociétés de la Croix-Rouge française.

Monument à la gloire
des infirmières française et alliées
victimes de leur dévouement

-
1914-1918


   Juliette ADAM
, âgée de 88 ans, s'excusa de ne pouvoir prendre la parole en raison de son grand âge, et fit lire par le secrétaire général du Comité d'érection, Auguste MAZURE, le discours qu'elle avait rédigé à cette occasion :

   [...] Si Reims fut choisie par notre Oeuvre, c'est que le nombre des victimes y a été plus grand que dans les autres villes du front bombardé [...]
    Aux premiers coups de canon tirés en Alsace, la mobilisation des Infirmières fut immédiate, préparée qu'elle était par la Croix-Rouge française, Oeuvre que nous sommes fiers de saluer ici en la personne de son noble président le général PAU.
    Saluons aussi l'incomparable dévouement de Mme PAU, de la Société de Secours aux Blessés militaires et de Mesdames les représentantes de l'Union des Femmes de France, de l'Association des Dames françaises.
   Plus nombreuses dans les villes plus grandes, qui pouvaient recevoir plus de blessés, les Infirmières eurent à Reims plus de victimes.
   
Nos Soeurs étrangères accoururent. On sait ce que les Infirmières américaines ont apporté d'aide, donné de soins incessants, de dévouement courageux à nos blessés et aux leurs.
   Nous saluons aujourd'hui Mme COX BENET, qui les représente dans notre Oeuvre.
   Nous saluons M. COTY, notre plus généreux donateur.
   L'Angleterre, notre alliée de la première heure, avait mobilisé les mères, les soeurs de ses fils qui combattaient avec les nôtres ; le Portugal, la Grèce, le Japon, la Serbie, la Roumanie, la Pologne, les Tchèques, nous avaient envoyé leurs Infirmières.
   Toutes ces nobles femmes ont donné aux combattants le secours immédiat et l'espoir d'une courte ou lente guérison. Toutes ont laissé dans le coeur de ceux qui ont survécu à l'horrible hécatombe le noble sentiment de la reconnaissance.
   Monsieur le Maire, au nom du Comité de notre Oeuvre, j'ai l'honneur de remettre ce Monument à la garde de la Ville-Martyre, et de vous offrir pour ses archives le Livre d'Or où sont inscrits tous les noms que nous avons pu recueillir de celles qui, jusqu'à la mort, se sont dévouées à nos enfants.


Le monument et ses inscriptions

   Le monument aux infirmières de Reims est situé au centre du Square de l'Esplanade Cérès, devenue depuis 1932, Place Aristide BRIAND, à la croisée du boulevard Lundy, du boulevard de la Paix, de l'avenue Jean-Jaurès et de la rue Cérès.

Face au boulevard de la Paix :
l'inscription rappelant que le monument a été élevé
par souscription internationale

À l'appel généreux
de Juliette Adam
ce monument
a été élevé
par souscription
internationale
en mémoire
de toutes les infirmières
des nations alliées
qui ont péri
victimes de leur dévouement
-
La ville de Reims
garde pieusement
en ses archives
le Livre d'Or
des nobles femmes
tombées au champ d'honneur

  Le monument est constitué d'une colonne cylindrique entourée dans sa partie supérieure d'une frise de lauriers et surmontée d'une urne funéraire entourée d'une guirlande et décorée de pommes de pin, symbole d'éternité.

   Cette colonne est dressée sur une base octogonale décorée d'une frise de coquilles Saint-Jacques, où sont gravés les noms des nations alliées de la France pendant la 1ère guerre mondiale : 

Face au boulevard Lundy

France - Grande-Bretagne - Italie
Japon - Australie - Canada
Pologne - Grèce - Portugal


Face au boulevard de la Paix

Russie - Roumanie - Serbie
Union Sud-Africaine - Indes
Belgique - États-Unis d'Amérique


Le monument face à la rue Cérès

Deux infirmières venant au secours d'un blessé

Face à l'avenue Jean-Jaurès :
un ange ailé apportant des roses

symbole de renouveau

Face au boulevard Lundy :
une inscription rendant hommage
aux infirmières de la 1ère guerre mondiale

Sur terre et sur mer
elles ont partagé
les dangers du soldat.
Elles ont bravé
dans les hôpitaux
bombardés et torpillés
le feu de l'ennemi
la contagion
l'épuisement.
En consolant la douleur
elles ont aidé la victoire.
Honneur à elles.
Elles vivront à jamais
dans le souvenir
de leurs patries
fières et reconnaissantes.


La plaque commémorative
du bombardement du 30 mai 1944
érigée par la Croix-Rouge

   Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, une plaque commémorative a été ajoutée à la base du monument face à la rue Cérès, à la mémoire des infirmières et brancardiers de la Croix-Rouge tués lors du bombardement allié du 30 mai 1944 qui a fait 52 morts et 70 blessé graves.
   Ces infirmières et ces brancardiers du dispensaire de la Croix-Rouge de la rue Belin s'étaient réfugiés dans une cave-abri de la Place Luton frappée de plein fouet par une bombe.

À la mémoire
des infirmières et brancardiers
tombés victimes de leur devoir
sous le bombardement du 30 mai 1944
-
Mlle B. OESTREICHER, diplômée d'État
Mme C. COMPAGNE - Mlle Y. BONNARD
Mme D. MICHEL - Mlle J. NEVEUX
Mr G. BOTTOLLIER - Mr R. PILLION


La tempête de 1999
et le ravalement de 2005

   La tempête de décembre 1999 a arraché les arbres dont les feuillages masquaient en partie le monument, désormais bien dégagé.

 

    En 2005, à l'occasion du 60e anniversaire de la Victoire alliée de 1945, la Ville de Reims a fait ravaler le monument.


Le Livre d'Or des infirmières

   L’inscription gravée sur le monument « La ville de Reims garde pieusement en ses archives le Livre d'Or des nobles femmes tombées au champ d'honneur », m’a longtemps laissé perplexe, car aux archives municipales, on n’avait pas trace de ce livre d’or, finalement retrouvé dans les archives de la Croix-Rouge rue Houzeau-Muiron, et remis à la Ville de Reims en 2005.
   Désormais, conformément à l'inscription du monument, un exemplaire du Livre d'Or des infirmières
est
conservé aux Archives municipales et communautaires de Reims.


   Y sont inscrits les noms de 979 infirmières dont 434 appartenant au seul Empire britannique :

      - 346 infirmières du Royaume-Uni
      -   53 infirmières canadiennes
      -   35 infirmières d'Afrique du Sud
      - 283 infirmières américaines
      - 211 infirmières françaises
      -   33 infirmières italiennes
      -   18 infirmières roumaines

Listes des infirmières françaises
appartenant aux trois sociétés de la Croix-Rouge
« tombées au champ d'honneur »

      -   28 infirmières appartenant à l' Association des Dames françaises
      - 131 infirmières dont 18 religieuses, appartenant à la Société française de secours aux blessés ( 13 d'entre elles ont été tuées lors de bombardements d'hôpitaux )
      -   52 infirmières appartenant à l'Union des Femmes de France

Listes des ambulances, hôpitaux du front, hôpitaux auxiliaires, bombardés pendant la Première Guerre mondiale

      - 13 ambulances et hôpitaux du front
      - 25 hôpitaux auxiliaires


Le monument aux infirmières
de Pierrefonds

  Il existe en France, à Pierrefonds, un autre monument aux infirmières, plus modeste, érigé dans le parc de l'Hôtel des Bains, transformé en ambulance chirurgicale pendant la Première Guerre mondiale, à l'emplacement où l'infirmière Elisabeth JALAGUIER a été tuée en 1918 lors d'un bombardement aérien.

   Après le bombardement de 1918, une pierre blanche avait été posée à l’endroit précis où cette infirmière avait été tuée, puis en 1933, une souscription avait été lancée pour l'érection d'un monument sur le site vendu en 1954 à l’Union Nationale des Combattants par la société propriétaire du parc. Le monument, inauguré en 1955, intègre une statue en bronze réalisée d’après un projet en plâtre du sculpteur REAL DEL SARTE, retrouvé dans les caves du château et exposé aujourd’hui dans l’église Saint Sulpice de Pierrefonds.

   En 1996, ce monument rétrocédé à la Ville de Pierrefonds a été restauré.


90e anniversaire de l'armistice de 1918

11 novembre 2008
Le drapeau de la délégation départementale de la Croix-Rouge
pendant la sonnerie aux morts


Sources documentaires

    Délibérations du Conseil municipal de Reims ( 1922 et 1944 ), Service de documentation de la Ville de Reims.
 Livre d'Or
conservé dans les archives de la Croix-Rouge française à Reims, remis en 2005 à la Ville de Reims et déposé aux Archives municipales et communautaires de la Ville de Reims.
 
   L'Éclaireur de l'Est, 30 mai 1944.
 
   Rapport du préfet de la Marne au ministre de l'Intérieur daté du 30 juin 1944, Archives départementales de la Marne, M 2336.
   Matthieu GERBAULT et André KILLIAN, La Croix-Rouge française à Reims ( 1870-1948 ), catalogue de l'exposition présentée à la Bibliothèque Carnegie, Bibliothèque de Reims et  Délégation départementale de la Croix-Rouge française, 2005.
   Daniel PELLUS, La Marne dans la guerre 1939-1945, Horvath, 1987.

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