Au début du
XXe siècle,
l'Europe à son apogée domine encore le monde,
mais elle est secouée de contradictions :
- en raison des disparités
de développement économique et social qui
caractérisent les pays qui la composent ;
- du fait aussi des
rivalités
et des tensions
qui opposent les grandes puissances européennes et qui multiplient
les risques
de guerre.
I.
En 1914, l'Europe domine encore le monde |
La primauté européenne repose sur
3 facteurs :
1/ Le
dynamisme démographique
L'Europe
qui compte
450 millions d'habitants rassemble
1/4 de la population mondiale et la pression démographique
pousse chaque année un peu plus d'un million d'émigrants
à quitter le Vieux continent pour les colonies et le Nouveau
monde où environ 40 millions d'Européens se sont installés.
2/
L'expansionnisme colonial
Les métropoles
européennes possèdent des
empires coloniaux qui couvrent environ la moitié
de la surface du globe en
particulier en Afrique et en Asie, et dont les habitants
représentent 1/3 de la population mondiale.
3/
L'avance technologique et économique
Acquise
à la faveur de la Révolution industrielle, cette avance
a fait de l'Europe où ont surgi toutes les
innovations technologiques sur lesquelles reposaient cette
révolution, l'usine,
le banquier du monde, et l'arbitre du commerce international.
Elle lui a donné la capacité d'étendre
sa zone d'influence économique à des pays
comme la Russie, l'Empire ottoman ( Turquie ), la Perse ( Iran )
et la Chine, pays qui sont devenus des sortes de semi-colonies européennes
.
II.
Mais l'Europe est profondément divisée |
1/ L'opposition
entre Europe du Nord et Europe du Sud
L'Europe
de 1914 ne forme pas un ensemble homogène.
Elle est constituée d'États qui présentent
des situations
très diverses :
- du point de
vue de l'étendue (
vastes empires et petits pays ) ;
- du point de
vue de la population
( plus de 140 millions de Russes, 65 millions d'Allemands, 45
millions de Britanniques, à peine 40 millions de Français
et seulement
36 millions d'Italiens et 20 millions de Turcs ) ;
- du point de
vue du système
politique ( républiques et monarchies ;
régimes démocratiques parlementaires et autocraties ;
unifications politiques anciennes ou au contraire tardives et récentes ;
États plus ou moins centralisés ; États
plus ou moins intégrés autour d'une nation et États
multinationaux ) ;
- du point de
vue économique
( Europe industrielle du Nord-Ouest et Europe agrarienne du Sud et
de l'Est ).
2/ Les
rivalités entre puissances européennes
Elle s'exprime
à trois niveaux. :
a) sur
le plan des nationalités
- minorités
séparatistes et indépendantistes de l'Empire austro-hongrois ;
- peuples allogènes ( non russes ) de l'Empire russe ;
- panslavisme de la Russie orthodoxe protectrice de la Serbie
et qui cherche à prendre le contrôle des Détroits
tenus par les Turcs musulmans ;
- pangermanisme de l'Empire allemand qui aspire à achever
la réunion des terres allemandes.
b) sur
le plan colonial
- rivalité franco-anglaise
au Soudan ( Fachoda, 1898 ) ;
- rivalité anglo-allemande en Afrique australe et orientale ;
- rivalité franco-allemande au Maroc ( crise de Tanger
en 1905 et d'Agadir en 1911 ) ;
- rivalité franco-italienne en Tunisie.
c) sur
le plan géostratégique autour des zones d'influence
- rivalité
anglo-allemande sur les mers ;
- rivalité austro-russe dans les Balkans.
III.
Les rivalités entre pays d'Europe et la montée
des tensions |
1/
La formation de deux systèmes d'alliance
La
Triple Alliance ou Triplice
Oeuvre au départ
du chancelier Bismarck,
elle s'est ébauchée autour de l'Allemagne après sa victoire sur la France en 1870, avec l'objectif
d'isoler la France et de lui ôter toute velléité
de revanche et de reconquête de l'Alsace-Moselle.
En 1914, elle unit les
monarchies de l'Europe médiane : Empire allemand,
Empire austro-hongrois et Royaume d'Italie.
Elle s'est aussi élargie à l'Empire
ottoman qui contrôle les Détroits, la
Méditerranée orientale et tout le Proche-Orient
où l'Allemagne cherche à prendre pied ( construction
de la ligne de chemin de fer Bosphore-Ankara-Bagdad ou Bagdadbahn ).
De son côté, l'Autriche-Hongrie
y a rattaché la Roumanie et la Bulgarie,
pays qui se sentent menacés par les visées expansionnistes
russes en direction des Détroits.
La
Triple Entente
Oeuvre
de Delcassé qui a été ministre des Affaires étrangères
de 1898 à 1905, elle a pour origine les efforts de
la diplomatie française à la fin du XIXème
et au début du XXème siècle pour sortir
la France de l'isolement dans lequel la diplomatie allemande cherchait
à l'enfermer.
Elle est le résultat d'accords
bilatéraux successifs négociés
avec persévérance par la France.
Pour sortir de son isolement et obliger
l'Allemagne à combattre sur deux fronts dans l'hypothèse
d'un nouveau conflit, la France a d'abord fait alliance avec la Russie tsariste à
la fin du XIXème siècle.
Au début du XXème siècle,
en même temps qu'elle renforçait l'alliance
franco-russe,
la France s'est efforcée d'affaiblir
la Triple Alliance en essayant d'en détacher
l'Italie,
et de se rapprocher du Royaume-Uni.
C'est pour atteindre ces objectifs que la
France joua avec ces deux pays la carte de l'apaisement et
du compromis sur le terrain colonial, abandonnant à
l'Italie la Tripolitaine et l'Afrique orientale au Royaume-Uni,
tandis qu'elle leur demandait de lui laisser les mains libres
au Maroc que convoitait l'Allemagne.
En 1904, inquiet des progrès économiques
et commerciaux de l'Empire allemand et de la puissance acquise
sur mer par la flotte allemande, le Royaume-Uni accepte de sortir de son « splendide et impérial
isolement » et adhère à l'Entente
cordiale nouée avec la France,
bientôt renforcée en 1907 par un accord
anglo-russe.
Le soutien que lui ont apporté ses
alliés lors des deux crises
marocaines de 1905-1906 et de 1911, ont permis
à la France de s'imposer au Maroc face à l'Allemagne et d'y installer son protectorat.
Ces deux crises ont montré que les
rivalités coloniales entre les grandes puissances européennes pouvaient conduire à la guerre et que les
systèmes d'alliances pouvaient transformer cette guerre
en conflit
généralisé.
Dans l'immédiat, la logique des systèmes
d'alliances accélère la course aux armements.
2/ La
course aux armements
Sur
le plan naval, l'Allemagne a commencé à se doter, sous l'impulsion de l'amiral
Von Tirpitz, d'une puissante flotte de guerre, défi auquel
les Britanniques ont répliqué en prenant l'engagement
que pour
un navire de guerre allemand construit, le Royaume-Uni riposterait
en en construisant deux ( two power standard ).
Dès la fin du XIXème siècle
et le début du XXème siècle, l'Allemagne et la France ont mis au point et adopté les plans
militaires qui ont été appliqués en 1914
- côté
allemand, le
plan Von Schlieffen, fondé sur la nécessité pour l'Allemagne
de combattre sur deux fronts, fait le pari que la mobilisation russe
sera longue et que l'armée allemande pourra exploiter ce
délai et lancer à l'Ouest, en violant la neutralité
belge, une attaque rapide d'encerclement et d'écrasement
des armées françaises en 6 semaines ;
- côté
français, le plan XVII ne croit pas à une violation de la
neutralité belge, compte que la Russie se lancera immédiatement
dans la bataille sans attendre que sa mobilisation soit achevée,
et prévoit de jeter l'essentiel des troupes françaises
dans une offensive à l'Est destinée à reconquérir
l'Alsace-Lorraine.
IV.
La crise austro-serbe de l'été 1914 et la marche
à la guerre |
1/
La crise des Balkans
La guerre
de 1914-1918 aurait pu éclater sur le terrain des rivalités
coloniales, mais c'est finalement sur un autre terrain qu' elle a
éclaté, celui des Balkans.
Au Sud de l'Europe centrale,
à la faveur du déclin
de l'Empire ottoman depuis le XIXème siècle,
- les guerres
d'indépendance ( Serbie, Bulgarie, Grèce ),
les affrontements entre minorités
ethniques et les conflits régionaux se multipliaient ;
- la petite Serbie,
devenue indépendante, en se plaçant sous la protection
de l'Empire russe, cherchait à réunir
en un seul Etat tous les Slaves du Sud de l'Europe centrale,
à commencer par ceux de Bosnie-Herzégovine, province
annexée par l'Autriche-Hongrie en 1908 ;
- les empires rivaux austro-hongrois
et russe avaient des visées communes en
direction des Détroits et de la Méditerranée
orientale.
2/
L'été 1914 : la marche à la guerre
L'attentat
de Sarajevo
L'archiduc héritier d'Autriche-Hongrie, François-Ferdinand,
et son épouse sont assassinés par l'étudiant Prinzip,
à Sarajevo,
capitale de la Bosnie-Herzégovine,
le 28
juin 1914.
La
riposte autrichienne et l'engrenage des alliances
L'Autriche-Hongrie
adresse un ultimatum à la Serbie.
Le
28 juillet, l'Autriche-Hongrie
déclare la guerre à la Serbie.
Le
30 juillet, la Russie mobilise.
Le
1er août, l'Allemagne
déclare la guerre à la Russie ; la France mobilise.
Le
3 août, l'Allemagne
déclare la guerre à la France.
Le 4
août, l'Allemagne envahit le territoire de la Belgique
neutre. Le Royaume-Uni déclare la guerre à l'Allemagne.