|
C'est
à Nuremberg, ville des parades nazies sous le IIIème Reich, que
furent jugés les principaux dirigeants de l'Allemagne hitlérienne.
Procès des vaincus par les vainqueurs, le
procès de Nuremberg a occulté l'exécution par les Soviétiques
de 4 500 officiers polonais découverts dans le charnier de
Katyn, tout comme l'« holocauste nucléaire »
d'Hiroshima et de Nagasaki.
De nombreux responsables nazis en fuite ont
échappé à son verdict et certains d'entre eux ont même été utilisés
et protégés par les Alliés à l'époque de la guerre froide.
Mais le procès de Nuremberg a permis de démonter
le mécanisme de destruction mis en place par les nazis,
et il a fait reconnaître juridiquement
les crimes de guerre et les crimes contre l'humanité. |
Le
premier tribunal international de l'Histoire
« C'était
la première fois dans l'histoire qu'était érigé un tribunal affirmant
juger au nom de la conscience universelle.
Symboliquement le procès se déroula à Nuremberg,
haut-lieu du national-socialisme, du 20 novembre 1945 au 30 septembre
1946.
Devant le tribunal composé de magistrats représentant
les Quatre Grands
( États-Unis, Grande-Bretagne, URSS, France ), comparaissaient
21 accusés.
Parmi eux, il y avait les acolytes directs de Hitler
( GOERING, HESS, RIBBENTROP ), le théoricien du racisme Alfred ROSENBERG,
des gauleiters ( SEYSS-INQUART pour la Hollande, FRANK pour la
Pologne ), des militaires ( les généraux KEITEL et JODL, les amiraux
RAEDER et DOENITZ ), des diplomates, des économistes ( SCHACHT et
SPEER ).
Contre eux étaient invoqués quatre chefs d'inculpation
:
- crimes contre la paix,
- préparation de guerres
d'agression,
- crimes de guerre,
- conspiration contre l'humanité.
Baldur von SCHIRACH, ancien chef des Jeunesses hitlériennes,
fut avec SPEER le seul à admettre une part de responsabilité et à
exprimer des regrets pour son action.
Dans son verdict le tribunal prononça trois acquittements,
quatre condamnations à des peines de 10 à 20 ans de prison, trois
emprisonnements à vie ; tous les autres inculpés furent condamnés
à être pendus ».
François
BÉDARIDA, Le nazisme et le génocide , histoire et enjeux, Nathan,
1989.
Chronologie
du procès de Nuremberg
25
octobre 1941 : Le Premier ministre britannique CHURCHILL
réclame « le
châtiment de ces crimes, qui doit être désormais, l'un des objectifs
de cette guerre ».
8
août 1945 : Signature des accords
de Londres établissant les statuts d'un tribunal
militaire international chargé de juger les grands criminels
de guerre et définissant les chefs d'inculpation.
20
novembre 1945 : Ouverture du procès
au Palais de justice de Nuremberg.
1er
octobre 1946 : Lecture du verdict : douze
condamnations à mort ; trois à la prison à vie ; quatre
à des peines de 10 à 20 ans d'emprisonnement ; trois acquittements.
Sur
le banc des accusés
Au
premier rang des accusés, de gauche à droite, GOERING
( commandant en chef de la Luftwaffe ), HESS
( adjoint et dauphin de Hitler jusqu'en 1941 ), RIBBENTROP
( ministre des Affaires étrangères ), KEITEL
( chef du haut-commandement de la Wehrmacht ), KALTENBRUNNER
( chef de la Sécurité du Reich ) et ROSENBERG
( théoricien de l'antisémitisme, ministre des Territoires occupés
de l'Est ) ; au second rang, DOENITZ,
RAEDER ( commandants en chef de
la Marine ), Von SCHIRACH ( chef
de la Jeunesse hitlérienne et gauleiter de Vienne ) qui se tient debout,
et SAUCKEL ( commissaire général
à la main d'œuvre ).
« Les
déportés accusent »
Marie-Claude
VAILLANT-COUTURIER, résistante française,
déportée au camp d'Auschwitz puis de Rawensbruck, témoigne
devant le tribunal militaire international de Nuremberg
Une
du journal Regards,
8 février 1946
La définition des crimes de guerre
et des crimes contre l'humanité
Crimes
de guerre : C'est-à-dire
les violations des lois et coutumes de la guerre. Ces violations comprennent,
sans y être limitées, l'assassinat, les mauvais traitements ou la
déportation pour des travaux forcés, ou pour tout autre but, des populations
civiles dans les territoires occupés, l'assassinat ou les mauvais
traitements de prisonniers de guerre ou des personnes en mer, l'exécution
des otages, le pillage des biens publics ou privés, la destruction
sans motif des villes et des villages ou la dévastation que ne justifient
pas les exigences militaires.
Crimes
contre l'humanité : C'est-à-dire l'assassinat, l'extermination,
la réduction en esclavage, la déportation et tout acte inhumain commis
contre toutes les populations civiles, avant ou pendant la guerre,
ou bien les persécutions pour des motifs politiques, raciaux ou religieux.
Articles
6 b et 6 c des statuts du
Tribunal militaire international,
adoptés par les Alliés lors des Accords de Londres du 8 août 1945.
En
France, il y a prescription pour les crimes de guerre au bout de 30
ans, mais les crimes contre l'humanité ont
été déclarés imprescriptibles par la loi du 26 décembre 1964.
Fallait-il
juger les nazis allemands
de la manière dont on l'a fait à Nuremberg ?
« Dans
son principe, Nuremberg représente quelque chose de positif.
C'est la première pierre d'une justice
internationale, le premier effort pour fonder une jurisprudence
à l'échelle de toutes les nations. […] ».
René
REMOND, historien français.
« Il
n'aurait pas fallu que ce fût un tribunal des vainqueurs.
À titre d'exemple : le juge soviétique a
fat écarter le débat sur Katyn. […]
Mais le principe du procès était bon, y compris
la définition de crimes contre l'humanité […].
Parallèlement, le procès des chefs militaires
japonais s'est fait uniquement sur les crimes de guerre ».
Alfred
GROSSER, historien français.
« On
peut toujours invoquer des arguments juridiques contre Nuremberg
et se dire que c'étaient les vainqueurs qui étaient au banc de l'accusation.
Mais enfin, les crimes étaient sans précédent.
Il fallait un châtiment rapide, exemplaire, approprié ».
Herbert
LOTTMAN, historien américain.
« Il
fallait assurément sanctionner de façon exemplaire.
Mais, à Nuremberg, les Alliés ont oublié la voix
des Allemands de la résistance à Hitler.
En 1933, les camps de concentration se peuplaient
déjà de prisonniers, tous Allemands.
En 1945, les comptes se sont réglés à partir
d'une fausse équation : d'un côté, les vainqueurs, tous forcément
contre Hitler ; de l'autre, les vaincus, tous forcément nazis.
Moi qui appartenait à une famille antihitlérienne,
je me souviens de la gêne de mon père face aux collaborateurs belges
ou français.
Plus tard, pendant la guerre froide, les
Alliés se sont servis des anciens nazis, dont certains sont devenus
ministres du très-chrétien chancelier Adenauer. […] »
Rudolf
VON THADDEN, historien allemand.
« CHURCHILL
pensait qu'il fallait exécuter les dirigeants nazis et non les juger.
Si c'est l'autre solution qui
a prévalu, c'est en vertu du caractère inouï de cette guerre et
des crimes commis.
C'est aussi parce que les Alliés
ont été frappés par le caractère bureaucratique de la machine de
mort nazie et par son légalisme.
Ils ont compris que l'oubli
de lois élémentaires de l'humanité dans l'obéissance aux lois de
l'Etat, l'oubli de la légitimité dans la légalité, pouvait être
plus meurtrier que ce qu'on appelle communément la barbarie ».
Alain
FINKIELKRAUT, philosophe français."
Les leçons de Nuremberg ",
L'Histoire, n° 136, septembre1990.
En
1948, l'Assemblée générale de l'ONU a adopté
une convention pour prévenir et punir le crime de génocide.
En
1964, les crimes contre l'humanité ont été
décrétés imprescriptibles.
Premier tribunal international de l'Histoire,
le tribunal de Nuremberg a ébauché une juridiction
internationale qui s'exprime aujourd'hui dans deux
instances par le Conseil de sécurité de l'ONU :
- le tribunal
pénal international de La Haye pour juger les crimes
de guerre commis dans l'ex-Yougoslavie, créé en
1993 ;
- le tribunal
pénal international pour le Rwanda chargé de juger
les instigateurs du génocide rwandais, créé en
1995. |
Les documents du procès de Nuremberg bientôt disponibles en numérique
Procès de Nuremberg
Sur le site Wikipédia
|