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Liste des documents
Document
n°1
: Texte
lu par le maréchal Pétain, vice-président du Conseil, au Conseil
des ministres, le 13 juin 1940.
Document
n°2
: Maréchal
Pétain, chef de l'Etat français : discours radiodiffusé le
30 octobre 1940.
Document
n°3
: Vichy
vu par le général de Gaulle.
Document
n°4
: Note
au sujet de la déportation des Juifs de la zone non occupée,
4 septembre 1942.
Document
n°5
: Affiche
de propagande « La Révolution Nationale »,
1942.
Questions Question 1 : Présenter
les documents.
Question 2 : En
fonction du sujet, sélectionner, classer et confronter les informations
tirées de l'ensemble des documents et les regrouper par thèmes.
Question 3 : Rédiger,
de façon synthétique ( environ 300 mots ), une réponse argumentée
à la problématique définie par le sujet, en faisant appel, y compris
de manière critique, à l'ensemble des informations tirées
des documents.
Texte
lu par le maréchal Pétain, vice-président du Conseil,
au Conseil des ministres, 13 juin 1940
au Château de Cangé ( Indre et Loire )
où le président de la République A. Lebrun
a établi sa résidence provisoire de repli
« Nous
reconnaissons tous que la situation militaire est aujourd'hui très
grave. (...)
Il faut bien examiner les conséquences qui résulteraient
de la continuation de la lutte.
Si
l'on admet l'idée de persévérer grâce à la constitution d'un réduit
national, on doit reconnaître que la défense de ce réduit ne pourrait
être organisée par les troupes françaises en débandade, mais par des
troupes anglaises fraîches.
Mais si ce réduit, établi dans une région maritime,
pouvait être organisé, il ne constituerait pas, à mon avis, une garantie
de sécurité et exposerait à la tentation d'abandonner ce refuge incertain.
Or il est impossible au gouvernement, sans émigrer,
sans déserter, d'abandonner le territoire français.
Le devoir du gouvernement est, quoi qu'il arrive,
de rester dans le pays sous peine de n'être plus reconnu pour tel.
Priver la France de ses défenseurs naturels dans
une période de désarroi général, c'est la livrer à l'ennemi.
Le renouveau français, il faut l'attendre en restant
sur place, plutôt que d'une conquête de notre territoire par des canons
alliés dans des conditions et un délai impossibles à prévoir.
Je suis donc d'avis de ne pas abandonner le sol
français et d'accepter la souffrance qui sera imposée à la patrie
et à ses fils.
La renaissance française sera le fruit de cette
souffrance.
Ainsi la question qui se pose en ce moment n'est
pas de savoir si le gouvernement demande l'armistice, mais s'il accepte
de quitter le sol métropolitain
Je déclare, en ce qui me concerne, que hors du gouvernement
s'il le faut, je me refuserai à quitter le sol métropolitain, je resterai
parmi le peuple français pour partager ses peines et ses misères.
L'armistice est à mes yeux la condition nécessaire
de la pérennité de la France éternelle ».
Cité par Marc FERRO dans : Pétain,
Fayard, 1987.
Maréchal
Pétain, chef de l'État français :
discours radiodiffusé le 30 octobre 1940
« Français,
J'ai
rencontré jeudi dernier, le chancelier du Reich ( à
Montoire ).
Cette rencontre a suscité des espérances et provoqué
des inquiétudes.
Je vous dois à ce sujet quelques explications.
Une telle entrevue n'a été possible, quatre mois
après la défaite de nos armes, que grâce à la dignité des Français
devant l'épreuve [...]
La France s'est ressaisie.
Cette première rencontre entre le vainqueur et le
vaincu marque le premier redressement de notre pays.
C'est librement que je me suis rendu à l'invitation
du Führer.
Je n'ai subi de sa part, aucun diktat, aucune pression.
Une collaboration a été envisagée entre nos deux
pays.
J'en ai accepté le principe. Les modalités en seront
discutées ultérieurement.
A tous ceux qui attendent aujourd'hui le salut de
la France, je tiens à dire que ce salut est d'abord entre nos mains.
A tous ceux que de nobles scrupules tiendraient
éloignés de notre pensée, je tiens à dire que le premier devoir de
tous les Français est d'avoir confiance. [...]
C'est dans l'honneur et pour maintenir l'unité française
- une unité de dix siècles - dans le cadre d'une activité constructive
du nouvel ordre européen que j'entre, aujourd'hui, dans la voie de
la collaboration.
Ainsi, dans un avenir prochain, pourrait être allégé
le poids des souffrances de notre pays, amélioré le sort de nos prisonniers,
atténuée la charge des frais d'occupation.
Ainsi pourraient être assouplie la ligne de démarcation
et facilités l'administration et le ravitaillement du territoire.
Cette collaboration doit être sincère. Elle doit
être exclusive de toute pensée d'agression.
Elle doit comporter un effort patient et confiant.
L'armistice, au demeurant, n'est pas la paix.
La France est tenue par des obligations nombreuses
vis-à-vis du vainqueur.
Du moins reste-t-elle souveraine.
Cette souveraineté lui impose de défendre son sol,
d'éteindre les divergences de l'opinion, de réduire les dissidences
de ses colonies.
Cette politique est la mienne. Les ministres ne
sont responsables que devant moi.
C'est moi seul que l'Histoire jugera.
Je vous ai tenu jusqu'ici le langage d'un père.
Je vous tiens aujourd'hui le langage du chef.
Suivez-moi. Gardez confiance en la France éternelle ».
Pierre MILZA, Sources de la France du XXe
siècle, textes essentiels, Larousse, 1997.
Vichy
vu par le général de Gaulle
( Passage
consacré au procès du Maréchal Pétain )
« Pour moi, la
faute capitale de Pétain et de son gouvernement c'était d'avoir conclu
avec l'ennemi, au nom de la France, le soi-disant "armistice". [...]
Par dessus tout, avoir soumis l'Etat à la discrétion
du Reich, c'est cela qu'il fallait condamner, de telle sorte que la
France fût dégagée de la flétrissure.
Toutes les fautes que Vichy avait été amené à commettre
ensuite : collaboration avec les envahisseurs ; lutte menée [...]
contre les Français Libres ou contre les alliés ; combats livrés à
la résistance en liaison directe avec les polices et les troupes allemandes
; remise à Hitler de prisonniers politiques français, de juifs, d'étrangers
réfugiés chez nous ; concours fourni, sous forme de main-d'oeuvre,
de matières, de fabrications, de propagande, à l'appareil guerrier
de l'ennemi, découlaient infailliblement de cette source empoisonnée ».
Charles DE GAULLE,
Mémoires de guerre - Le salut (1944-1946). Plon, 1959.
Note
au sujet de la déportation des Juifs
de la zone non occupée
« Paris, le 4
septembre 1942.
Au cours de l'entretien qui a eu lieu le 29 entre
Oberg ( officier
supérieur des SS en France ) et Laval, le Président a indiqué que les diplomates étrangers lui
ont, à plusieurs reprises, posé la question de savoir pour quelle
destination étaient acheminés les transports des Juifs livrés aux
Autorités d'occupation.
Il répondait qu'en principe, on les emmenait, dans
la partie sud de la Pologne.
Il demande maintenant de lui indiquer la façon de
répondre, afin d'éviter une divergence avec les renseignements donnés
par nous.
Il a été convenu que le Président Laval communique
en réponse à de telles questions que les Juifs transférés de la zone
non occupée aux Autorités d'occupation sont transportés pour être
employés au travail dans le gouvernement général.
Signé : Hagen, chef supérieur des SS et de la Police du Commandement
Militaire en France ».
Cité
par Serge KLARSFELD dans : Vichy - Auschwitz.
Le rôle de Vichy dans la solution finale de la question juive en France,
1942, Fayard, 1983.
Affiche
de propagande « La Révolution nationale » ( 1942 )
Editée par le centre de propagande de la Révolution nationale d'Avignon.
http://ww2.ac-poitiers.fr/hist_geo/spip.php?article546
La
présentation des documents |
L'étude
porte sur 5 documents :
4 textes, dont 3 sont contemporains de la période de Vichy,
et un seul document iconographique.
Parmi
les textes, deux ont le même auteur, le maréchal Pétain,
mais ils correspondent à des déclarations qui ont été
faites à des dates différentes et dans un contexte différent.
Le 13 juin 1940 (
document 1 ), le maréchal Pétain, qui n'est
encore que vice-président du Conseil dans le gouvernement Paul
Reynaud, fait une déclaration à l'occasion d'un conseil
des ministres qui examine dans l'urgence la situation militaire de
la France. La débâcle des troupes françaises s'accélère,
mais la capitale, Paris, que le gouvernement a quitté le 10
juin, n'est pas encore occupée par les Allemands.
Le 30 octobre 1940 (
document 2 ), le maréchal Pétain s'exprime
en tant que chef de l'État français, à la tête
du régime instauré à Vichy au
début du mois de juillet sur
les décombres de la IIIème République mise à
mort avec l'aide de Pierre Laval. Pétain a accepté la
défaite, sollicité et signé un armistice qui
a entraîné un découpage de la France en zones,
l'occupation de la zone Nord, et la soumission à l'Allemagne
nazie. Il s'adresse aux Français à la radio, pour leur
rendre compte de sa rencontre avec Hitler
le 24 octobre à
Montoire où il a engagé la France sur la voie de la
collaboration avec l'Allemagne nazie.
Le document 3 est un texte de Charles de Gaulle, postérieur aux événements
qu'il évoque, tiré d'un ouvrage publié en 1959,
peu de temps après son retour au pouvoir à la tête
de la Vème République.
De
Gaulle, au moment de la débâcle en mai-juin 1940, avait
tenté de stopper l'offensive allemande à la tête
de ses chars à Montcornet et devant Abbeville, puis il était
entré au gouvernement pour y combattre toute idée d'armistice.
Mis en minorité par le camp de l'acceptation de la défaite
conduit par Pétain, il avait rejoint Londres pour y lancer
ses appels successifs à la résistance et y jeter les
bases de la France libre.
Il s'agit ici d'un extrait des Mémoires du général concernant les années 1944-1946, époque
où le chef de la Résistance, devenu chef du Gouvernement
provisoire de la République française, s'est trouvé
confronté au procès du maréchal Pétain
traduit devant la Haute Cour de Justice. Il avait alors, en raison
de son grand âge, commué en détention à
perpétuité la condamnation à mort qui avait frappé
Pétain.
Le document 4 est un document d'archive daté de septembre 1942.
Il s'agit d'une note émanant de Hagen, un
des chefs nazis chargés de la déportation des Juifs
de France, à un moment où la mise en oeuvre par les
nazis de la « solution finale » est bien engagée
dans les deux zones avec la complicité du régime de
Vichy et de la police française. Placée sous les ordres
de René Bousquet, celle-ci a participé quelques mois
auparavant, en juillet 1942, à la rafle du Vél d'Hiv
à Paris, en zone occupée. Le document 5 est une affiche de propagande datant de 1942, qui exalte sous l'appellation
de « Révolution nationale » les principes
et les valeurs que le régime de Vichy a essayé de substituer
aux principes et aux valeurs de la IIIème République.
Classement
, confrontation et regroupement
des informations par thèmes |
Thèmes |
Un
régime
né de la défaite ... |
autoritaire
et réactionnaire... |
qui
collabore avec l'Allemagne nazie |
Document
1 |
Au
sein du gouvernement confronté à la débâcle de mai-juin 1940,
Pétain se range dans le camp de ceux qui renoncent à poursuivre
le combat aux côtés des Alliés. Il refuse de quitter le territoire
français et affirme qu'il faut solliciter un armistice. |
Les
propos de Pétain annoncent les thèmes qui vont être ceux de
la Révolution nationale :
- le « renouveau français »,
la « renaissance française » soumis à
l'acceptation de la « souffranec » qui
découle de la défaite ;
- l'exaltation des valeurs du passé et de
la « France éternelle ». |
La
collaboration avec l'Allemagne nazie dans laquelle va s'engager
le régime de Vichy découle directement :
- de la défaite française acceptée par Pétain
;
- et de l'armistice qu'il considère dès le 13 juin
1940 comme « nécessaire ». |
Document
2 |
La
poignée de main de Pétain à Hitler à Montoire consacre l'acceptation
de la défaite française par le régime de Vichy convaincu que
la victoire de l'Allemagne est définitive. |
Pétain,
chef de l'Etat français, se présente :
- comme un « père »
bienveillant qui déclare vouloir alléger les souffrances des
Français ;
- et comme un « chef »
à qui il faut obéir, qu'il faut suivre, et à qui il faut faire
confiance parce qu'il incarne la « France éternelle ». |
La
collaboration d'Etat avec l'Allemagne nazie est voulue et assumée
par Pétain, qui cherche à convaincre les Français que cette
collaboration permettra d'atténuer leurs souffrances et d'intégrer
la France au « nouvel ordre européen ». |
Document
3 |
Pour
de Gaulle, l'acceptation par Vichy de la défaite et de l'armistice
constitue une « faute capitale » et originelle
par laquelle le régime du maréchal Pétain a livré la France
aux nazis. |
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Pour
de Gaulle, la collaboration sous toutes ses formes ( militaire,
policière, économique et politique ) est une « flétrissure ». |
Document
4 |
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En
acceptant de livrer les Juifs réfugiés en zone non occupée,
le régime de Vichy s'est fait le complice de la solution finale
mise en œuvre par les nazis. |
Document
5 |
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Sous
l'appellation de « Révolution nationale »,
le régime de Vichy s'affirme tout à la fois comme antirépublicain,
antidémocratique, anticommuniste, antimaçonnique
et antisémite.
Il rejette la devise et les symboles républicains tout
comme les valeurs démocratiques qu'il assimile au désordre et
au chaos.
Il exalte la France rurale et artisanale, le retour à
la terre,
les valeurs du passé mobilisées autour de sa devise « Travail-Famille-Patrie ». |
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Le
régime de Vichy est né du refus de poursuivre le combat aux côtés
des Alliés, de l'acceptation de la défaite de mai-juin 1940 et de
l'armistice sollicité par Pétain sous prétexte d'éviter à l'armée
française le déshonneur d'une capitulation.
Dès octobre 1940 à Montoire, Pétain, persuadé que
la victoire de l'Allemagne était définitive, a engagé la France dans
une collaboration d'Etat, avec l'illusion que cela permettrait d'alléger
le sort des prisonniers et le montant des frais d'occupation, de protéger
les Français, d'atténuer leurs souffrances et d'intégrer la France
au nouvel ordre européen.
Pour de Gaulle, le chef de la France libre, le régime
de Vichy en acceptant la défaite et l'armistice a commis une faute
capitale conduisant inéluctablement à l'engrenage de la collaboration.
La collaboration politique a entraîné la fascisation
du régime.
La collaboration militaire a conduit Vichy à combattre
les Français libres et les Alliés, et à cautionner la création de
la Légion des volontaires français.
La collaboration policière a ouvert la voie aux
exactions de la Milice.
La collaboration économique a réduit l'économie
de la France au pillage et mis sa main d'œuvre au service de l'effort
de guerre nazi.
Devançant souvent les exigences allemandes ( statut
des Juifs d'octobre 1940, livraison aux nazis des réfugiés politiques
étrangers ), le régime de Vichy a accepté d'être le complice des nazis
dans la mise en œuvre de la « Solution finale »
en France.
Sous couvert de « Révolution nationale »,
Pétain, chef de l'État français, a mis en place un régime de
pouvoir personnel, autoritaire et réactionnaire qui a bafoué les libertés
républicaines et démocratiques.
Sans parvenir à imposer un parti unique comme dans
les États totalitaires, ce régime a été un régime policier,
d'exclusion, xénophobe, anticommuniste, antimaçonnique et antisémite,
qui a fini par s'apparenter aux dictatures fascistes.
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