Le village de
Perthes-les-Hurlus qui s'étendait sur 1 300
hectares dont 1 250 hectares de terres labourables, comptait
151 habitants au recensement de 1911.
Il a été l'enjeu de combats
acharnés de la fin du mois de septembre 1914 jusqu'en avril
1915.
Au nord-ouest sur la croupe de la cote 200 s'aligne
un
chapelet d'entonnoirs aujourd'hui inaccessibles
et recouverts de végétation.
Un
entonnoir après l'explosion d'une mine à Perthes en
1918
C'est
là que la 34ème Division, constituée par le 14ème,
le 59ème et le 83ème Régiments d'infanterie,
a livré 23 combats, 40 assauts, perdant 6 500 hommes.
Le monument commémoratif qui rappelle ces pertes
importantes, menacé de destruction par les tirs, a été transporté
à l'ouest du Camp de Suippes.
Une
tranchée à Perthes
Lancement
de grenades devant Perthes
Soldats
français revenant des premières lignes
dans les ruines de Perthes
In Memoriam - 1914 / 1964
Lettre à ses anciens paroissiens de D. M. Jourdain,
curé de Perthes-les-Hurlus de 1912 à 1914
Après
la guerre de 1914-1918, devant l'impossibilité de réintégrer
votre village, vous, et vos parents, vous vous êtes installés
là où vous avez cru pouvoir continuer votre vie.
Presque tous ceux qui, aujourd'hui, ont dépassé
la cinquantaine, se sont mariés et établis au gré
des circonstances.
Des enfants vous sont nés, qui se sont
mariés à leur tour.
Pour eux, Perthes n'est pas même un souvenir,
puisqu'ils ne l'ont pas connu.
Mais pour nous, il reste la terre de Chanaan,
que nous avons quittée devant l'avance d'une armée
qui s'avérait, pour lors, particulièrement cruelle,
sans espoir de l'habiter à nouveau.
Nous avons conservé le souvenir des collines
qui le cernaient de toutes parts, du ravin de la Goutte, du moulin
à vent qui réduisait seigle et orge en farine pour
vos bestiaux ...
Le moulin
« Cette
meule marquait
la Ferme de
Ernest, Marie, Lucie,
Pauline SIMON »
... des perrières
qui fournirent la craie pour la construction de vos maisons et de
votre église.
L'image de votre blanche église n'est pas
encore effacée de votre mémoire.
La
plupart d'entre vous y ont été baptisés, d'aucuns
y ont fait leur communion solennelle, et plusieurs s'y sont mariés
...
L'église,
construite en style roman à la fin du 19e siècle
en remplacement d'une ancienne église édifiée
au 14e siècle qui tombait en ruines,
a été entièrement détruite par l'artillerie
allemande.
Son autel,
dominé par le vitrail de Saint-Martin, est toujours devant
vos yeux
À gauche de l'église, s'étendait le petit cimetière
où vos ancêtres reposent toujours, et dont quelques tombes,
en 1939, étaient encore marquées de leur croix.
Le
cimetière
Famille
Duglin et Adrien Haimart
« Priez pour eux »
Notre village était petit et ne comptait
que 156 habitants en 1914.
Mais la bonne entente y régnait.
La richesse n'était pas grande, mais chacun était
à l'aise, et c'est peut-être là la raison pour
laquelle nous nous trouvions heureux [...]
La vie y était simple.
Lever et coucher selon la saison.
Des repas où le porc et la volaille accompagnaient
les légumes du jardin.
Un travail suivi toute l'année.
De rares distractions.
Un bal, chaque année, à l'occasion
de la fête patronale. [...]
Le temps ne paraissait pourtant pas long.
Le travail était au coeur de chacun :
même les soirées d'hiver étaient laborieuses [...]
Tout cela est passé, mais nous a laissé
au coeur un souvenir nostalgique, dont nous vivons encore ; nous
ne connaîtrons plus ce temps, car il est révolu [...]
Nous avons quitté Perthes avec le ferme espoir
de nous y réinstaller .
En réalité, nous avons pu y retourner
une fois ou l'autre, mais nous n'avons pas eu l'autorisation de nous
y réinstaller.
L'anéantissement total du village, les ravages
que la guerre avait faits sur les 9/10ème du territoire ont
incliné le gouvernement à comprendre notre village dans
la Zone rouge.
Vestiges
des maisons du village
Perthes est donc mort au champ d'honneur, et vous
avez payé cette gloire de vos biens.
À Perthes vous avez aussi laissé les cendres
de vos ancêtres.
D.
M. JOURDAIN
Cazaux,
le 1er août 1963.
L'office
religieux du 22 septembre 2002
dans les ruines de l'église du village
Le
nom du village détruit de Perthes-les-Hurlus
est rattaché aujourd'hui à celui de Souain
Perthes-les-Hurlus...
Une terre hostile sur laquelle régnaient les loups hurlant. Hurlus, hus lupis, hurle le loup [...]
Frédéric
CHEF, " La mémoire des villages perdus ",
in Etranges pays de Marne,
Les Editions du Coq à l'Ane, 2001
Au
cimetière communal de Souain
Sur
les flancs de la Butte de Sommepy aux pieds de l'église
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