I.
Camps de concentration et camps d'extermination |
Même
si la mortalité dans les camps de concentration de l'Allemagne
nazie a été élevée, il convient d'emblée
de bien distinguer les termes de camps de
concentration et de camps d'extermination.
Le terme de camp de concentration n'a pas été
inventé par les nazis.
Il a été utilisé dès
le début du XXème siècle par les Britanniques,
lors de la guerre des Boers qui les a opposés en Afrique du
Sud aux descendants des colons néerlandais.
Dans
l'Allemagne hitlérienne, la fonction
des camps de concentration était une fonction d'exclusion et
de terreur. Ces camps étaient destinés à
recevoir non seulement les adversaires des nazis, mais aussi tous
les individus considérés comme dangereux pour le régime
nazi. Les uns et les autres étaient arrêtés et
amenés dans ces camps pour y être astreints au travail
forcé.
Les
camps d'extermination eux, ont
été construits pour liquider
physiquement les Juifs et les Tsiganes, groupes ciblés
par les nazis, comme étant deux peuples de trop, voués,
conformément à l'idéologie mortifère nazie,
à disparaître totalement, selon des modalités
mobilisant tous les moyens dont disposait l'État nazi, au terme
d'un processus dans lequel l'extermination
constituait une fin en soi, quels que soient les moyens
utilisés pour y parvenir .
Chronologiquement,
l'ouverture des camps de concentration a précédé
celle des camps d'extermination.
1.
L'ouverture des premiers camps à partir de 1933
Les
premiers camps de concentration ont été ouverts dans l'Allemagne hitlérienne
dès l'arrivée au pouvoir des nazis, pour recevoir les communistes,
les autres opposants politiques ( socialistes et démocrates chrétiens
) et les Juifs, mélangés avec les droits communs, les « asociaux
» et les malades mentaux, d'abord à Dachau
près de Munich en mars 1933, puis à Oranienburg-Sachsenhausen,
Buchenwald, Flossenburg
et Ravensbrück pour les femmes.
D'autres camps ont été implantés dans les pays annexés
ou occupés par l'Allemagne nazie, en 1938 à Mauthausen
en Autriche, en 1939 à Theresienstadt
en Tchécoslovaquie, en 1940 à Auschwitz
en Pologne, en 1941 au Struthof-Natzweiler
en Alsace.
2. Le développement du système concentrationnaire nazi
Deux
catégories de déportés ont été acheminés vers ces camps : les « déportés
résistants et politiques » d'une part, et les déportés
qualifiés de « raciaux »
d'autre part, c'est-à-dire les Juifs et les Tziganes.
Les premiers camps ont été agrandis, d'autres ont
été ouverts à Neuengamme, Bergen-Belsen,
Dora, Gross-Rosen
en Allemagne, à Maïdanek et Stutthof
en Pologne.
Des
convois affluèrent de toute l'Europe occupée vers ces camps placés
sous le contrôle des SS.
Dans ces camps de concentration, les déportés étaient
soumis au travail forcé dans les kommandos,
les usines secrètes d'armement et les filiales des grandes firmes
allemandes installées dans ou à proximité des camps.
Douze heures de travail par jour, les appels interminables
dès l'aube et tard dans la nuit par tous les temps, les sévices infligés
par les kapos, la sous-alimentation,
les maladies mal soignées : les déportés les plus faibles ne résistaient
pas longtemps à ce régime.
Les « camps de la
mort lente » devinrent d'inépuisables réservoirs
de main d'œuvre constamment renouvelés, et les déportés des esclaves
de la machine de guerre nazie.
En
Pologne à partir de 1941-1942, des camps d'extermination
ont été ouverts à Chelmno,
Treblinka, Sobibor,
Belzec, ou implantés dans des
camps de concentration préexistants tels que Maïdanek
et surtout Auschwitz-Birkenau,
dans le cadre de la «
solution finale ».
: L'objectif
des nazis était l'extermination totale, systématique,
« biologique »
des Juifs et des Tsiganes qualifiés de « sous-hommes
», dans
des centres de mise à mort immédiate.
La
plupart des déportés étaient exterminés
le jour même de leur arrivée ou au cours des jours suivants,
à l'issue d'une sélection
qui envoyait immédiatement dans les chambres à gaz les
enfants, les vieillards, les femmes, les malades, tandis
que les plus valides étaient utilisés quelque temps
comme esclaves au travail forcé,
avant d'être liquidés à leur tour.
Le
fonctionnement des camps de concentration et des camps d'extermination
relevait d'une organisation rigoureuse et
scientifique,
faisant appel aux techniques les plus modernes.
Cette organisation s'appuyait sur une
gestion rigoureuse des convois de déportés
acheminés vers les camps dans des trains
qui devaient partir à l'heure, et poussait la recherche
de l'efficacité jusqu'à l'exploitation
commerciale et industrielle des cadavres : après
avoir confisqué les vêtements, les chaussures, les effets personnels
des déportés dès leur arrivée dans les camps, les nazis récupéraient
après les avoir exterminés, dents en or, lunettes, dentiers, tandis
que les cheveux étaient tissés pour fabriquer des couvertures, les
os broyés et transformés en engrais.
II.
Véracité et unicité du génocide |
1.
Un génocide programmé
Contrairement
à ce que tentent de faire croire les négationnistes et les pseudo-révisionnistes
qui nient le génocide ou cherchent à le banaliser, les
nazis ont bien exterminé Juifs, Tziganes et Slaves.
Le génocide a bien eu lieu et il n'est pas le fruit
du hasard ou des circonstances liées à la 2ème guerre mondiale.
La « solution finale
de la question juive » procède d'une volonté systématique
d'extermination, inscrite dans l'idéologie nazie, ouvertement exprimée
dans Mein Kampf dès avant
l'arrivée au pouvoir de Hitler,
mise en œuvre avec obstination à partir de 1933 et conduisant tout
droit au génocide désigné aujoud'hui par les Juifs sous le nom de
Shoah, « destruction totale ».
2.
La mise en œuvre systématique du génocide
En
janvier 1939, Hitler
considérait comme probable « l'extermination
de la race juive en Europe »
si une guerre devait intervenir.
Après la défaite et l'occupation de la Pologne,
les Juifs polonais ont été rassemblés à proximité des nœuds ferroviaires
et enfermés dans des ghettos où
ils furent astreints au travail forcé.
En 1940, après la défaite française, les nazis envisagèrent
un moment la possibilité de transférer les juifs d'Europe à Madagascar.
En attendant, la politique hitlérienne de déportation des Juifs et
de ghettoïsation se poursuivit en Allemagne, en Autriche, en Tchécoslovaquie
et en Pologne.
Entre
le printemps et l'automne
1941, les chefs nazis ont pris trois décisions très
importantes pour mettre en œuvre leur politique d'extermination systématique
des juifs, sous le nom de « solution
finale de la question juive » :
- la création
de forces mobiles spéciales organisées au sein de groupes d'intervention
( Einsatzgruppen )
chargés de fusiller sur place en même temps que les cadres et les
membres du parti communiste, tous les Juifs, hommes, femmes, et enfants,
au fur et à mesure de l'avance allemande en territoire soviétique
;
- l'extension
du génocide à l'ensemble du continent européen ;
- la construction
de camps d'extermination équipés
de camions à gaz et de chambres à gaz
utilisant le monoxyde de carbone ou le Zyklon
B ( acide prussique ), ainsi que de fours
crématoires.
Le
20 janvier 1942, les modalités du génocide ont été définitivement
arrêtées à la conférence de Wannsee
sous la présidence de Heydrich
secondé par Eichmann.
Au printemps 1942, fut lancée l'« opération
Reinhard » qui concernait la liquidation des Juifs
de Pologne.
Dans le même temps, le processus d'extermination
s'intensifia; de toute l'Europe occupée partaient des convois à destination
des camps d'extermination principalement celui d'Auschwitz-Birkenau.
3.
Le camp d'Auschwitz
Implanté
en Pologne à partir de 1940, le camp d'Auschwitz
est devenu rapidement le plus important et le plus vaste des complexes
aménagés par les nazis dans le cadre de la « solution finale
».
Il comprenait Auschwitz
I, le camp de concentration, Auschwitz
II -Birkenau qui était à la fois un camp de travail et
un camp d'extermination, et Auschwitz III-Monowitz,
un camp de travail au service de l'IG-Farben qui y avait installé
une usine de caoutchouc.
A partir de 1942, Auschwitz-Birkenau a été la destination
de très nombreux convois de déportés raciaux en majorité juifs, venant
de toute l'Europe occupée.
C'est vers ce camp que furent dirigés
67 des 72 convois de déportés raciaux qui ont quitté la France
pendant l'occupation allemande.
Mais ce camp a reçu également des déportés non raciaux,
déportés politiques et résistants, classés Nacht
und Nebel (« Nuit et Brouillard »),
c'est-à-dire destinés à disparaître «
sans laisser de traces ».
Dès
leur arrivée à Auschwitz-Birkenau, les déportés
étaient triés et rangés sur deux files :
- d'un côté,
les plus vigoureux, ceux que les SS pensaient pouvoir utiliser au
moins un temps pour le travail forcé ;
- de l'autre
côté, les enfants, les vieillards, les adultes hommes et femmes malades
ou trop affaiblis par le voyage, qui étaient dirigés immédiatement
vers les chambres à gaz.
Au total, 1 million de déportés sont morts
dans ce camp.
III.
Le bilan de la déportation et du génocide nazi |
Le
bilan de la déportation de répression
Pour
l'ensemble de l'Europe soumise à
l'annexion ou à l'occupation de l'Allemagne nazie, nous ne
disposons pas d'un bilan global précis
du nombre des déportés qui ne relevaient pas de la « solution
finale » : on
avance les chiffres de 550 000 à
650 000.
En
France, dans les années 1950-1960,
l'enquête
sur la déportation conduite par le Comité d'histoire
de la 2e guerre mondiale
a dénombré 66 000 déportés « non
raciaux », dont 1/3 seulement a survécu à
la déportation.
En
2004, le Livre-Mémorial, édité
par La Fondation pour la mémoire de la déportation ( FMD ),
aboutit à un bilan sensiblement
plus élevé : près
de 86 000 « déportés
de répression » ( résistants,
politiques, otages, Républicains espagnols ),
dont 40 % sont morts dans les prisons ou les camps nazis.
Parmi
ces déportés :
- 7 000
Républicains espagnols réfugiés en
France et livrés aux nazis par le gouvernement de Vichy ;
- et 5 000 résistants
déportés dans le cadre du décret « Nuit
et Brouillard ».
Le
bilan de la Shoah
Environ
5 100 0000 victimes
- Morts
par suite de la « ghettoïsation » et des privations :
800 000
- Morts
par exécutions en plein air par les Einsatzgruppen et autres
fusillades : 1 300 000
- Morts
dans les camps : 3 000 000 ( dont environ 1 000 000 à Auschwitz )
Répartition
géographique
- Europe Orientale : plus de
3 400 000 ( dont 3 000 000 en Pologne )
- URSS : plus
de 700 000
- Europe
centrale et balkanique : environ 730 000
- Europe
occidentale : environ 210 000
En
France
Au
total, 76 000 Juifs ont été
déportés de France vers les camps nazis,
soit environ un quart de la population
juive qui résidait dans notre pays en
1940.
Au début de la Seconde Guerre mondiale, bien
qu'il soit difficile de l'évaluer exactement, on considère
que 330 000 Juifs, approximativement,résidaient
en France et que la moitié d'entre eux était
étrangère.
2 500 déportés
juifs seulement ont échappé à l'extermination.
Avec
les 3
000 Juifs morts dans
les camps français d'internement et
le millier de Juifs exécutés
ou fusillés comme otages,
le bilan total avoisine les 80 000 victimes.
Le
bilan du génocide des Tsiganes
au
total environ 250 000 victimes
c'est-à-dire 1/3 de la population tsigane.
En
France : 15 000 Tsiganes déportés ; très
peu ont survécu
Au
total, près de 162 000 déportés
de répression ou de persécution, ont été
acheminés depuis la France vers les camps de concentration
et d'extermination nazis.
IV.
La complicité du régime de Vichy
dans la mise en oeuvre du génocide en France |
En
France, le gouvernement de Vichy n'a jamais eu pour objectif l'extermination
des juifs, mais il n'en a pas moins été l'instrument efficace de la
première étape du génocide.
Dès octobre 1940, avec la promulgation d'un statut
des Juifs, la politique vichyste d'exclusion et de persécution,
expression d'un antisémitisme et d'une xénophobie à la française,
a défini, classé et isolé les Juifs résidant en France.
À partir de 1942, l'appareil d'Etat français, sous la direction
de Pierre Laval, a apporté son
concours à la mise en œuvre en France par les nazis de la «
solution finale », en particulier lors de la rafle
du Vélodrome d'Hiver à Paris où, les 16 et 17 juillet 1942,
la police française sous l'autorité de René
Bousquet a arrêté
13 000 juifs « apatrides ».
Plus
de 80% des Juifs déportés de France ont été arrêtés par la police
française.
En acceptant de livrer les juifs étrangers aux nazis
pour affirmer la souveraineté de son gouvernement et tenter d'obtenir
des concessions en faveur des juifs français, Laval s'est engagé dans
une politique de marchandage dangereuse et illusoire, parce que condamnée
à toujours céder un peu plus aux nazis.
Pour
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