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Les Soviétiques à Reims

 

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     Afin de rassurer STALINE, inquiet après la signature des capitulations partielles intervenues en Italie du Nord et en Allemagne du Nord, et le convaincre de la volonté des Alliés occidentaux de ne pas conclure de paix séparée avec l'Allemagne, le général EISENHOWER avait demandé qu'un représentant du Haut commandement soviétique soit admis à participer aux ultimes négociations de Reims.

    
Le général SOUSLOPAROV a donc été envoyé au Quartier général d'Eisenhower par le Haut commandement soviétique, mais il n'était autorisé à signer aucun accord, quel qu'il soit.

Le général Sousloparov et son interprète, le lieutenant Cherniaev,
dans la Salle de Reddition de Reims

   Le général SOUSLOPAROV demanda au Haut commandement soviétique et au gouvernement de l'Union soviétique l'autorisation de signer l'acte de capitulation de Reims.

   Au moment de la signature, il n'avait toujours pas reçu de réponse et il prit néanmoins la décision de signer.

Le général Sousloparov signe l'acte de capitulation
de l'Allemagne nazie à Reims, le 7 mai 1945

La signature du général Sousloparov au bas de l'acte de Reims

   Aussitôt après la cérémonie de la signature, les officiers soviétiques se sont rendus avec les autres officiers alliés dans le bureau d'EISENHOWER, où les plénipotentiaires allemands ont été présentés au commandant suprême.

   Le général Sousloparov, le lieutenant Cherniaev et le colonel Zenkovitch
dans le bureau du général Eisenhower, après la cérémonie de la signature

   STALINE, furieux, estima que la capitulation de Reims était une trêve séparée, une capitulation unilatérale, malveillante à l'égard de l'Union soviétique et destinée à faciliter le passage des troupes de la Wehrmacht et des civils allemands vers les lignes anglo-saxonnes, tandis que le chef de l'État-major de l'Armée rouge, le général ANTONOV, informait les Alliés occidentaux que les troupes allemandes continuaient de livrer combat aux troupes soviétiques.

   Pour STALINE, l'acte signé à Reims n'était que provisoire, et il exigea que l'acte définitif fût solennellement signé à Berlin, dans la capitale du IIIe Reich hitlérien vaincu, au Quartier général du maréchal JOUKOV.

Fac-smilé de l'acte signé à Berlin

   L'acte définitif de la capitulation de l'Allemagne nazie a été signé à Berlin :
   - par le maréchal KEITEL, au nom du Haut commandement allemand,
   - par l'amiral VON FRIEDEBURG, commandant en chef de la Marine allemande,
   - par le général STUMPF, représentant le commandant en chef de l'Armée de l'air allemande,
   - par le maréchal JOUKOV, au nom du Haut commandement de l'Armée rouge,
   - par le maréchal de l'Air TEDDER, au nom du Commandant suprême du Corps expéditionnaire allié en Europe ;
   et comme témoins :
   - par le général de LATTRE DE TASSIGNY, commandant en chef de la 1ère Armée française,
   - par le général SPAATZ, commandant de l'United States Strategic Air Force.


   Ce n'est qu'après la signature de Berlin dans la nuit du 8 au 9 mai 1945, que la victoire alliée fut annoncée à la population soviétique :
   -  par un message radiodiffusé à 2 heures du matin, le 9 mai,
   - et dans la Pravda datée du 10 mai dont la Une présentait des portraits du Premier ministre britannique, CHURCHILL, et du président des États-Unis, TRUMAN, associés à celui de STALINE.

Hier, notre grand peuple victorieux a célébré le jour du triomphe de sa juste cause.
Vive la grand organisateur et inspirateur de la victoire historique
du peuple oviétique sur l'impérialisme allemand
notre bien aimé chef et maitre le camarade Staline !

La Pravda, 10 mai 1945

   Quant aux officiers soviétiques présents à Reims le 7 mai 1945, nous ne savions pas, jusqu'en 2005, ce qu'ils étaient devenus et la rumeur laissait penser qu'ils avaient pu être liquidés ou envoyés au Goulag.
   
    En février 1990, j'ai tenté en vain d'obtenir des informations à leur sujet auprès de Iakov Petrovitch RIABOV, ambassadeur d'Union soviétique, à qui le préfet de la Marne, Yves BONNET, m'avait demandé de faire visiter la Salle de Reddition.

Dans la Salle de Reddition, le 16 février 1990, le préfet de la Marne, Yves Bonnet,
Yakov Petrovitch Riabov, ambassadeur d'Union soviétique, et Jean-Pierre Husson

L'ambassadeur d'Union soviétique photographié à la place
occupée par le général Sousloparov, le 7 mai 1945

   En mai 2005, au cours du colloque organisé à Reims autour de la réconciliation franco-allemande, j'ai pu m'en entretenir avec deux historiens russes : Oleg KEN, professeur à l'Université européenne de Saint-Pétersbourg, et avec Youri ROUBINSKI, directeur du Centre d'études françaises de l'Académie des sciences de Russie, ancien diplomate en poste en France à l'époque de l'Union soviétique.
  Voici en résumé ce qu'ils m'ont confié.
   Le général SOUSLOPAROV qui a signé à Reims sans en avoir reçu l'ordre de STALINE n'a pas été liquidé, ni envoyé au Goulag. Mais il est vrai que sa carrière en a été affectée dans ses perspectives de promotion.
   Chef de la Mission militaire soviétique auprès de l'ambassade d'URSS à Paris avant la 2e guerre mondiale, il avait dû assumer en France la signature du pacte germano-soviétique d'août 1939.
   En 1940, il a suivi l'ambassadeur d'URSS à Vichy.
   En 1941, après l'invasion de l'URSS par la Wehrmacht, il a rejoint Londres.
   On le retrouve ensuite à Alger lorsque le général de Gaulle décide d'y installer le Gouvernement provisoire de la République française.
   Il a suivi la représentation diplomatique soviétique auprès du Gouvernement provisoire qui s'est installée à Paris à la Libération, toujours comme chef de la Mission militaire soviétique en France.
   C'est à ce titre qu'il a été convoqué à Reims le 5 mai 1945 au quartier général d'EISENHOWER, pour y représenter le Haut commandement et le gouvernement soviétiques.
   Après la 2e guerre mondiale il est rentré en URSS, où il a exercé la fonction de professeur à l'Académie militaire diplomatique, chargé de former des promotions d'attachés militaires soviétiques.
   Il est décédé en 1974.

  En mai 2005, au colloque international de Reims consacré à la réconciliation franco-allemande, Oleg KEN, professeur à l'Université européenne de Saint Petersbourg, a présenté une contribution très éclairante sur la position de STALINE et de l'Union soviétique par rapport aux capitulations signées à Reims puis à Berlin en mai 1945.

7, 8 et 9 mai 1945 : batailles pour la mémoire future

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