Des hypothèses multiples,
des explications complexes
Dès
1944, on n'a pas manqué de s'interroger sur les
causes de la chute tragique
du réseau Possum, ce qui a conduit à envisager de
nombreuse hypothèses.
Dans l'immédiat, on a soupçonné
et accusé des personnes,
en premier lieu la Famille JEUNET
de Fismes, mais aussi le Belge
Jean-Pierre LORGÉ ou
le commissaire de police André CHAUVET,
et même le radio Conrad LAFLEUR,
mis en cause par plusieurs résistants marnais, en particulier
l'abbé FONTAINE, curé
de Savigny sur Ardres, avant d'envisager des
explications plus complexes liées aussi à
l'organisation interne et au fonctionnement même des réseaux
et des mouvements de Résistance.
La mise en cause
de la Famille Jeunet de Fismes
À
la Libération, les habitants
de Fismes, terriblement éprouvés, traumatisés
par les nombreuses arrestations qui ont frappé leur ville
et par les déportations qui ont suivi, ont
concentré la responsabilité de la chute du réseau
Possum et de ces arrestations sur la Famille
JEUNET.
Le 29 août 1944,
à Fismes, le gendarme
RAULIN, chef de section FFI, se présente au capitaine
ROUSSELIN, officier de liaison administrative, attaché
à la 90e Division d'infanterie américaine. Il est
envoyé par le lieutenant FFI Pierre DEMARCHEZ qu'il désigne comme étant le chef du secteur FFI de
Fismes, et déclare qu'Il a reçu l'ordre d'arrêter la Famille
JEUNET, de l'incarcérer, et de lui amener le père, Camille JEUNET, pour être
exécuté.
En réalité, DEMARCHEZ commande la centaine FFI Davoust
installée à la Ferme
de Chantereine sur la commune de Champlat,
qui a subi la veille une attaque meurtrière
de blindés allemands.
Le lieutenant PRIOLET
lui ayant clairement signifié que c'est lui et
non pas DEMARCHEZ qui est
le chef du secteur FFI de Fismes,
le capitaine ROUSSELIN refuse
catégoriquement de livrer Camille
JEUNET qui est gardé ainsi que toute la Famille
JEUNET dans la prison de la Gendarmerie
de Fismes en attendant une décision judiciaire.
Le 31 octobre 1944,
sept membres de la Famille JEUNET
sont jugés et condamnés
à mort par le Tribunal militaire de la VIe région
siégeant à Châlons-sur-Marne. Ce tribunal a
voulu à l'occasion de ses premiers
jugements celui qui concerne la Famille
JEUNET a été rendu dès sa deuxième
séance donner l'assurance aux familles des résistants déportés, en condamnant
le même jour sept personnes, que les
traîtres et les collaborateurs allaient être jugés
sans faiblesse.
Le 1er décembre
1944, le Tribunal militaire de cassation siégeant
à Paris rejette leur pourvoi.
Le père, Camille
JEUNET, est un ancien gendarme de Lons-le-Saunier retiré
à Fismes où il tient un débit de boissons avec
sa femme, Marie-Louise. Il est gracié par le général
de GAULLE, président du Gouvernement provisoire,
et sa condamnation à mort est commuée en travaux
forcés à perpétuité.
Colette, leur
fille cadette âgée de 18 ans, et leurs deux belles-filles, Louise, l'épouse de Roland,
et Raymonde, l'épouse
de Raymond, âgée
de 23 ans, sont également graciées par le général de GAULLE,
et leur peine commuée en travaux
forcés à perpétuité. Cette
peine de travaux forcés à perpétuité
a été ultérieurement commuée en 15
ans de travaux forcés pour Louise et pour Raymonde, et à
5 ans de travaux forcés
pour Colette.
Le 21 décembre
1944, Marie-Louise JEUNET, ainsi que ses deux fils Raymond,
âgé de 22 ans, et André,
âgé de 20 ans, sont fusillés à Châlons-sur-Marne. Marie-Louise
JEUNET est à ma connaissance la seule ou une des
seules femmes qui ont été exécutées
à la Libération dans le cadre de l'épuration
judiciaire.
Le 22 septembre 1945,
le fils aîné, Roland,
âgé de 23 ans, est fusillé à Reims rue de Courlancy, dans le parc de l'ancienne clinique
Mencière transformée en prison. Plusieurs Fismois,
à leur demande, font partie du peloton d'exécution.
Avant d'être exécuté, Roland
JEUNET a tenu à faire une déclaration en
présence de Maître BRISSART,
avocat à Reims, dans laquelle il
innocentait totalement son père Camille
et sa sur Colette.
L'innocence de Camille JEUNET et de sa fille
cadette, Colette, a
été attestée après la guerre,
par Georges d'OULTREMONT. Dans
son récit publié
en 1967, et dans des notes
manuscrites laissées à sa famille, il relate
qu'il a appris après la guerre que Marie-Louise
JEUNET était la maîtresse d'un officier
de la Gestapo, et que si elle ne l'a pas dénoncé,
c'est parce qu'elle savait que sa fille Colette était amoureuse de lui.
Le sort
de Raymonde Beuré
À
la Libération, Raymonde
BEURÉ, qui avait été la "
vigie " de l'opérateur-radio
du
réseau Possum,
Conrad LAFLEUR,
et la principale convoyeuse de ce réseau,
sans jamais ménager sa peine,
n'a pas été épargnée par le ressentiment
manifesté par la population de Fismes
à l'encontre de la Famille JEUNET.
En l'absence de Roland JEUNET
qui avait quitté la région pour l'Allemagne et qui
n'y est rentré qu'en avril 1945,
ce ressentiment s'est focalisé sur
son frère Raymond
et sa compagne, Raymonde
BEURÉ.
Dès la mise en place du réseau
Possum à Fismes en
août-septembre 1943, on
jasait au sujet de Raymonde
que l'on voyait très souvent entourée d'hommes. Selon
le témoignage de Raymond GALLET
et celui de Lucien LABDANT, Raymonde
était volage
; on la soupçonnait d'être devenue la maîtresse
de LAFLEUR ; son fiancé
Raymond JEUNET, très jaloux,
acceptait mal de la voir passer autant de temps seule avec le radio
du commandant POTIER,
et fréquenter d'aussi nombreux aviateurs alliés qu'elle
convoyait, et avec lesquels il lui reprochait d'être trop
amicale, trop familière ; la jalousie
de Raymond était aiguisée
par le fait que POTIER avait
refusé de l'intégrer à son équipe, intégration
qui lui aurait permis d'être plus souvent aux côtés
de Raymonde.
Cependant, aucun autre
document d'archive ne vient confirmer ces déclarations
postérieures à la guerre. Il n'a jamais été
question pour le chef du réseau
Possum de se séparer de Raymonde
BEURÉ. Envisageant à son retour de Londres
de déplacer son organisation dans la région d'Amiens,
il avait même prévu d'y installer LAFLEUR
et Raymonde.
Dans son rapport
sur les arrestations de Fismes
du 31 décembre 1943, le capitaine JOHNSON
déclare que l'accusation selon laquelle Raymonde
était devenue la maîtresse de LAFLEUR
n'était pas fondée, mais qu'elle se comprenait dans
un village où tout est exagéré, et qu'effectivement
Raymond JEUNET était
devenu extrêmement jaloux
de « cette amitié probablement
innocente » entre Raymonde
et LAFLEUR. Dans sa conclusion,
il dit sa conviction que « les
arrestations du 31 décembre à Fismes ont été
provoquées par Raymond Jeunet, soit à la suite d'une
dénonciation spontanée provoquée par la jalousie,
soit à la suite de son interrogatoire au siège de
la Gestapo ».
Raymonde BEURÉ
qui a épousé Raymond
JEUNET en juillet 1944,
devenue Madame veuve JEUNET après
l'exécution de son mari en décembre
1944 et la maman d'un petit Claude
portant le nom des JEUNET, a
été complètement associée
à cette famille dans la haine manifestée à
son égard par la population de Fismes.
Lorsque la peine de mort infligée à
Raymonde, graciée par
le général de GAULLE,
a été commuée en travaux forcés à
perpétuité, puis en 15 ans
de travaux forcés, la nouvelle a
suscité un vif émoi à Fismes. On
y a dénoncé cette décision obtenue, disait-on,
sur intervention du radio canadien Conrad
LAFLEUR revenu dans la région après la
guerre, comme une intolérable ingérence
étrangère dans le cours de la Justice française.
On ne comprenait pas non plus à Fismes
la bienveillante solidarité
manifestée à l'égard de Raymonde
par Suzanne BASTIN, l'adjointe
belge du commandant POTIER à
Paris.
Raymonde, détenue
successivement à la prison de Châlons-sur-Marne,
à la prison des Hauts-Clos près
de Troyes, puis au camp disciplinaire de
Schirmeck en Alsace, a espéré un temps
que son action résistante serait reconnue, qu'elle
serait graciée, remise en liberté et amnistiée.
Mais les années ont passé, laissant place au désespoir.
Dans ses lettres à ses parents, elle a décrit sa déchéance
: confrontée au froid et à la faim, elle est anémiée,
perd ses cheveux, se blesse au travail une brûlure
à un poste de soudure ; et surtout, elle ne supporte
pas d'être éloignée de son bébé
élevé par sa mère qui, malade, a dû le
placer dans une maternité de Reims.
Suzanne
BASTIN lui écrivait régulièrement
et chaque fois que cela était possible lui faisait parvenir
des colis. Elle avait aussi pris sous sa protection ses parents
sans travail et malades, acculés
en 1948 à quitter
Fismes pour aller s'installer à Courville.
Il faut cependant noter que la condamnation
à mort de Raymonde BEURÉ
avait aussi soulevé la réprobation
d'une partie des résistants, au point qu'une enquête
avait été diligentée par la Sécurité
militaire française, dont les conclusions ont
fait l'objet d'un rapport rédigé
le 6 décembre 1944 par le sous-lieutenant
BRUDER.
BRUDER y déclare
que « la peine de mort prononcée
contre Raymonde JEUNET née Beuré était injustifiée
en raison des immenses services qu'elle avait rendus à la
résistance pendant plusieurs mois ».
Il relève qu'elle a agi en excellente
Française, convoyant une très grande quantité
d'aviateurs, qu'« elle faisait
un travail extraordinaire qui faisait l'admiration de tous »,
qu'« à tout moment, elle
était à la disposition du réseau, acceptant
toujours de partir pour toute mission qu'on lui proposait et ce
sans vouloir accepter aucune rémunération ».
Il souligne « l'excellent travail
qu'elle a fourni », considère en conclusion
qu'« on doit en tenir compte
» et propose de transformer sa condamnation à
mort « en peine légère
de prison ».
Voici en résumé les principaux
éléments qui étayaient ce rapport
:
- l'enquête
menée avant le procès a été très
partiale et conduite par un commissaire
de police qui s'est efforcé d'écarter
les témoignages qui étaient favorables à Raymonde,
et d'obtenir par tous les moyens des témoignages
contre elle, en influençant les déclarations
des témoins, en allant même jusqu'à faire pression
sur un témoin pour obtenir une rétractation, et une
déposition devant le tribunal, qui s'est avérée
après enquête, « un
tissu de mensonges » ;
- les convocations des témoins à
décharge sont arrivées à destination le jour
même du procès, de telle sorte qu'ils étaient
absents et n'ont pas pu témoigner
;
- néanmoins, le commissaire du gouvernement
n'avait réclamé contre Raymonde
qu'une peine de 3 ans de prison,
et seulement trois condamnations à
mort contre la Famille Jeunet
;
- le chef départemental de la Résistance,
le capitaine Henri BERTIN, rappelé
à Londres en novembre 1943,
avait proposé Raymonde
pour la médaille de la Résistance
;
- rien ne pouvait être
reproché à Raymonde
avant son arrestation par Roland
JEUNET, au début du mois
de mai 1944 ;
- elle « ne
dénonçait pas les gens, mais les Allemands l'utilisaient
lorsqu'ils avaient en main un nombre de preuves suffisantes »
; comment pouvait-on l'accuser d'être responsable des arrestations
de Mailly, alors que dans ce secteur la majorité des pilotes
alliés recueillis ne relevaient pas
du réseau Possum, qu'elle n'y avait convoyé
que deux aviateurs, et que les Allemands avaient sans doute opérer
en se fondant sur « d'autres
indications » ;
- des résistants qu'elle ne connaissait
pas ont été arrêtés, d'autres qu'elle
connaissait bien n'ont pas été inquiétés.
Ce rapport établit également que
les rumeurs selon lesquelles
l'argent ramené de Londres par POTIER
avait été détournée par la Famille
BEURÉ, étaient totalement infondées,
et que cet argent avait été « remonté
à Paris ».
Interrogée
dans sa cellule de la prison de Châlons-sur-Marne par un officier
de la Sûreté militaire française en présence
de Conrad LAFLEUR, « elle
a reconnu qu'elle avait été lâche »,
mais elle a affirmé « qu'elle
n'avait jamais dénoncé personne aux Allemands, qu'elle
n'avait fait que confirmer ce qu'ils savaient déjà
lorsqu'ils avaient trop de preuves pour qu'elle puisse nier ».
S'agissant des interrogatoires
de Raymonde par la Gestapo, le
rapport Bruder note :
Il
ne faut pas oublier quels moyens les Allemands employaient pour
faire parler les personnes qu'ils arrêtaient et qu'ils savaient
coupables.
Ceci personne ne l'ignorait et chacun espérait
avoir la force de se taire s'il était arrêté.
Et pourtant dans l'atmosphère de la prison,
plus d'un a vu son courage s'évanouir et il est difficile
de ne pas admettre qu'une jeune fille de 20 ans n'a pas bien souvent
la résistance qu'il faudrait en pareille occasion .
En conclusion, l'auteur de ce rapport
relève que parmi ceux qui se sont acharnés à
accabler Raymonde, se trouvent
des personnes « qui se sont toujours
refusées à accomplir aucun travail pour la résistance
en raison des risques que cela comportait ».
Il exprime sa conviction que
même si Raymonde BEURÉ a fait preuve de lâcheté,
de complaisance à l'égard
de Raymond JEUNET en qui elle
a fait « une trop grande confiance »,
ignorant sans doute qu'il avait livré des noms de résistants,
et à l'égard des Allemands qui l'ont obligée elle, Raymonde, à les accompagner lors des arrestations
de Sillery et de Mailly-Champagne, cela ne peut être
qualifié d'« intelligence
avec l'ennemi », et que par conséquent, « elle n'a pas délibérément
trahi son pays ».
Raymonde BEURÉ est décédée en 2004 dans l'oubli et le chagrin loin de Fismes, dans le Midi
de la France où elle s'était retirée après
avoir purgé sa peine. Mais il n'est pas interdit de penser
que si, au début de 1944,
elle avait réussi à passer en Espagne et à
rejoindre Londres, comme Conrad LAFLEUR, Georges d'OULTREMONT et Jean
de BLOOMMAERT, elle aurait poursuivi son engagement dans
la Résistance, et aurait été reconnue après
la guerre comme une des résistantes
marnaises les plus distinguées.
Les soupçons qui ont pesé
sur le Belge Jean-Pierre Lorgé
Le
11 décembre 1944, dans un rapport concernant l'enquête
effectuée par ses services sur la
chute du réseau Possum,
adressé au capitaine DELLOYE de la Sûreté militaire belge, le capitaine
LEFORT de la Sûreté militaire française
arrivait à la conclusion que ce n'était pas la Famille JEUNET qui avait été
à l'origine de la descente de la Gestapo rue Lesage le
28 décembre 1943, mais
plutôt le Belge Jean-Pierre
LORGÉ.
Dès leur retour en Angleterre au
printemps 1944, Conrad LAFLEUR, Jean de BLOMMAERT et Georges
d'OULTREMONT ont rédigé des rapports qui
soupçonnaient également LORGÉ.
Peu de temps avant son arrestation, POTIER avait en effet déclaré à Jean
de BLOMMAERT qu'il envisageait
d'écarter LORGÉ de Reims, parce qu'il y faisait
la noce, était en relation avec beaucoup d'Allemands, s'était
endetté, et qu'il devenait dangereux.
LAFLEUR exprimait
sa conviction que LORGÉ aurait trahi par vengeance, en
apprenant qu'il allait être écarté du secteur
de Reims, et pour toucher la prime de 250
000 francs que les Allemands offraient à quiconque
les aidait à capturer un opérateur-radio en train
d'émettre.
La rumeur a
même circulé que LORGÉ avait été exécuté
par la Résistance française.
En réalité, LORGÉ a été arrêté
par les Allemands le 31 décembre
à Paris, et interné à Fresnes. En janvier 1944, il a été condamné à mort puis aux travaux forcés à
perpétuité, transféré à Compiègne, et déporté
à Buchenwald où
il a été libéré par les Alliés le 11 avril 1945.
Après la Seconde
Guerre mondiale, LORGÉ a été nommé inspecteur dans les services de
renseignements militaires belges. En 1946,
les États-Unis lui ont décerné la médaille
de la Liberté ( Medal of Freedom ). En
1960, il a reçu la médaille en bronze de
la Reconnaissance française pour avoir secouru et aidé des déportés
français du camp de Buchenwald au cours de leur détention et lors de l'évacuation
de ce camp. Il est décédé à Bruxelles en 1987.
L'énigme
du commissaire André Chauvet
En
1945, Conrad LAFLEUR, le radio de Possum, qui avait chargé le
Belge LORGÉ en
1944, a accusé le commissaire CHAUVET d'avoir été
à l'origine de la chute du réseau Possum.
Arrêtons-nous sur la personnalité
ambiguë de ce policier.
En 1920, jeune inspecteur de police provisoire en poste
dans la Marne il y avait épousé une institutrice
de Faverolles. Nommé inspecteur
stagiaire à Amiens, il avait été muté
à Châlons-sur-Marne à
la 12ème brigade de Police mobile, puis admis au concours
de commissaire de police, promu sur place
à Châlons sur Marne, et nommé commissaire
spécial adjoint à Reims. En poste au
début des années 1930 successivement à Brest, puis à Cannes,
il s'était opposé au maire de cette ville qui lui
reprochait ses sympathies en faveur du Front populaire, et avait
été muté à Épinal en 1937 .
En février 1941,
il est nommé commissaire central
à Reims et occupe cette fonction jusqu'en
mai 1942, époque où l'ancien préfet
de la Marne, René BOUSQUET,
originaire comme lui du Sud-Ouest, qui vient d'être nommé secrétaire général
à la Police, le fait venir à Vichy pour prendre la direction du service de
protection du chef du gouvernement, Pierre LAVAL. Relevé à
sa demande de cette fonction, il est nommé commissaire divisionnaire
de la sécurité publique à Lyon en janvier 1943.
En juin 1943, il rentre chez lui à Reims dans l'attente d'une
nouvelle affectation qui intervient en octobre
1943, avec sa nomination au poste de commissaire
divisionnaire de la sécurité publique à Melun. CHAUVET réside donc bien à Reims au moment où s'installe
l'état-major du réseau Possum. Le
22 décembre 1943, alors qu'il est en poste à Melun, il
est de retour à son domicile rémois pour
y passer les fêtes de Noël et du Nouvel An.
Le 28 décembre vers 11 heures 30, dans
un bar de la Place d'Erlon, il
rencontre le chef du réseau Possum, Dominique POTIER, et son radio, LAFLEUR, .
Le 31 décembre, il est arrêté par la Gestapo, écroué
à la prison de Reims,
puis transféré à Châlons-sur-Marne et à Fresnes. Remis en
liberté le 29 avril 1944,
en n'ayant subi, selon lui, qu'un seul interrogatoire rue des Saussaies,
siège de la Gestapo à Paris, il regagne son domicile
à Reims où il demeure jusqu'à la Libération,
époque où il est suspendu
de ses fonctions.
Dans un rapport daté de septembre 1944,
dans lequel il sollicitait sa réintégration dans la
police ou sa mise à la retraite, le commissaire
CHAUVET retrace son activité depuis juin 1940, et revient
sur son arrestation par la Gestapo
à Reims en décembre 1943.
Il y évoque ses liens avec une organisation
de récupération de pilotes alliés,
sa rencontre avec les chefs de
ce réseau à Reims fin décembre 1943, l'arrestation
de POTIER, suivie de sa propre
arrestation et de son incarcération
à la prison de Reims en même temps que le chef de Possum,
dont il confirme la tentative de suicide.
Après la Libération, André CHAUVET est écroué
à Reims, inculpé,
et déféré devant la Cour
de Justice de la Marne.
En février 1945, Conrad LAFLEUR entendu par la
Police judiciaire de Reims, confirme que
les chefs du réseau Possum sont entrés en contact
avec CHAUVET, quelques
semaines après leur arrivée dans la région
: LAFLEUR a été
présenté à CHAUVET par LORGÉ, qui a mis le
commissaire au courant de leurs activités ; CHAUVET leur a assuré qu'ils pouvaient compter
sur son aide, et leur a effectivement indiqué
deux terrains d'atterrissage ; présent le
28 décembre 1943 en fin de matinée à
la rencontre entre POTIER et CHAUVET, LAFLEUR se rappelle que CHAUVET leur
a dit : « Vous feriez mieux de
partir de Reims, car il y a longtemps que vous êtes ici ».
Selon LAFLEUR,
le commissaire CHAUVET savait
qu'il allait émettre l'après-midi
du 28 décembre dans une maison de la rue Lesage,
que s'il recevait un message de Londres pour POTIER,
il devait lui remettre le jour même lors d'un rendez-vous
fixé en fin d'après-midi, et que POTIER devait quitter Reims le lendemain.
LAFLEUR relève
que CHAUVET savait aussi qu'il
avait une liaison avec une serveuse du Café
de la Paix, arrêtée le
31 décembre 1943, qu'il connaissait l'adresse
de LORGÉ à Paris
où ce dernier a été arrêté également
le même jour, et qu'il savait que l'activité
du réseau était concentrée à Fismes où les arrestations ont été les plus nombreuses.
En conclusion, LAFLEUR considère comme suspect que CHAUVET ait pu être remis en liberté après quatre mois
de détention sans avoir été
interrogé. Il demande que les personnes qui ont
été internées en même temps que lui soient
entendues, et qu'on enquête sur le fait de savoir s'il
a pu entrer en contact avec POTIER durant leur incarcération à la prison de Reims. Nous
ne savons pas quelle suite a été donnée à
cette demande.
Il n'a jamais été
formellement établi que le commissaire CHAUVET ait été un agent de l'Abwehr.
Ses antécédents révèlent qu'avant-guerre
il avait été un policier républicain,
admis dans la franc-maçonnerie en
1924 à la Loge La Bienfaisance
châlonnaise, inscrit à la Ligue
de la République et à la Ligue
des droits de l'homme, et un sympathisant
du Front populaire.
Sous l'Occupation, il a protégé des familles
juives de Reims en particulier la Famille
SÉGAL, et il a joué plutôt un
rôle modérateur lors de plusieurs arrestations
par les Allemands de patriotes dénoncés par des collaborationnistes
rémois.
C'est sur ses compétences,
observées dans la Marne, que BOUSQUET l'a fait venir à Vichy à son corps défendant, CHAUVET mettant en particulier en avant que sa nomination à la tête
du service de protection de LAVAL était incompatible avec
son appartenance à la Franc-maçonnerie. CHAUVET a d'ailleurs tout fait pour se libérer de cette fonction
qui consistait à accompagner LAVAL dans ses déplacements quotidiens, et n'a eu de cesse d'obtenir
son retour à Reims, où demeurait sa famille.
En novembre 1945, André CHAUVET a été condamné à 5 ans d'emprisonnement et à 10 ans d'indignité nationale pour activité
anti-française et intelligence avec l'Allemagne.
En 1946, il
a bénéficié d'une remise
de peine de 2 ans, puis il a été amnistié en 1951.
Quelle
qu'ait pu être l'implication directe ou indirecte de la Famille
JEUNET de Fismes, du Belge Jean-Pierre
LORGÉ, du commissaire rémois André
CHAUVET ou du Canadien Conrad
LAFLEUR dans la chute du réseau Possum, il faut
aussi replacer cette chute dans le contexte
plus général de l'histoire de la Résistance
et des réseaux SOE en France et dans la Marne.
La chute de Possum, conséquence
de la chute du réseau Physician-Prosper
et de ses sous-réseaux ?
Le commandant CONNART qui connaît
bien la partie belge du dossier Possum,
et qui m'a fait profiter de son expérience d'ancien officier
de renseignement, dans la lecture et l'interprétation des
archives militaires que je n'avais pas l'habitude de manier, m'a
fait part de son intime conviction que la descente de la Gestapo rue Lesage à Reims, qui a entraîné le démantèlement du réseau Possum, était la conséquence de la longue série de dénonciations
et d'arrestations qui a frappé au
cours de l'été et de l'automne 1943 l'état-major
parisien du réseau SOE
Physician-Prosper, puis les agents de ce réseau, de ses sous-réseaux
et groupes locaux dans toute la zone Nord, y
compris et dans la Marne et en Ardenne.
Selon lui, les dénonciations perpétrées par la Famille
JEUNET de Fismes n'ont été que des facteurs
aggravants, une sorte d'opération d'intoxication pour ne pas dévoiler les sources et informations dont disposaient
déjà les services de contre-espionnage allemands,
dont le SD, le service de sûreté
de la Gestapo, était en train de prendre totalement le contrôle,
au détriment de l'Abwehr,
le service de renseignements de l'armée allemande ( SRA ). Il n'est pas dans les habitudes des services
de renseignement d'exhiber leurs sources, informateurs
ou dénonciateurs, et le fait d'orchestrer des dénonciations,
déjà connues par tous, en s'arrangeant pour que Raymond
JEUNET ou sa fiancée Raymonde
BEURÉ y assistent et soient bien aperçus
de la population, tout comme le retournement de Roland
JEUNET, leur permettaient de ne
rien dévoiler de ce que le SD savait, ni des sources
réelles dont il avait bénéficié.
Michel PICHARD,
ancien chef régional du BOA,
le Bureau des opérations aériennes de la France libre, dans une lettre adressée le
5 février 1979 à Jean
SIROT, fils de Raymond SIROT, membre de l'équipe CDLR-BOA de Gueux,
écrivait s'agissant du mécanisme de la répression
:
C'est
un domaine dans lequel il faut se garder d'être trop affirmatif.
Mes recherches m'amènent à constater
que, dans l'ensemble de la zone occupée, le SD et l'Abwehr,
qui étaient rivaux, disposaient d'un grand nombre d'indicateurs,
et de quelques agents doubles.
Lorsqu'ils passaient à l'action, les
Allemands veillaient soigneusement à ne pas « mouiller »
l'agent double : précaution élémentaire ayant
pour résultat que le « traître »
condamné après la guerre est souvent un « lampiste ».
Disons que, le plus souvent, la répression
avait de multiples racines.
Michel
Pichard, pseudos Piccolo, Pic, Bel, Gauss, Génératrice,
chef d'opérations BOA pour la région C en 1943,
puis coordinateur national du BOA en Zone Nord
( Archives Pierre Servagnat )
C'est pourquoi il ne faut pas éluder les
causes liées au contexte
marnais, à l'engorgement
des gîtes qui hébergeaient les pilotes alliés, à l'organisation interne de la Résistance, au manque de cloisonnement,
aux appartenances multiples et
au cumul des fonctions et des responsabilités
au sein des différents mouvements.
L'engorgement des gîtes
Parmi
les autres facteurs qui ont pu conduire à la chute du réseau
Possum, il y a tout d'abord la trop forte
concentration, en particulier à Fismes et à Reims dans le quartier du
faubourg de Laon, de gîtes hébergeant
les équipages alliés en attente d'être rapatriés par air vers l'Angleterre, gîtes bientôt saturés
à cause des mauvaises conditions atmosphériques hivernales
qui ont interrompu les opérations de ramassage par avion.
Le rapport de la Sûreté militaire
française sur les arrestations de
Fismes relève que « plus
l'organisation se développait, plus les indiscrétions
se multipliaient ».
Fin 1943, plus
de cinquante pilotes attendaient, qu'il fallait nourrir,
vêtir, déplacer d'un gîte à l'autre, munir
de faux papiers, en prenant de plus en plus de risques.
Les pérégrinations
du navigateur de la RAF Ian ROBB de septembre à décembre 1943,
qu'il a décrit dans le détail, montrent combien ces
nombreux déplacements faisaient courir de gros risques.
Arrivés en gare de Fismes accompagnés par le commandant POTIER, Ian ROBB et son camarade, le lieutenant DARLING, ont
été pris successivement en charge par :
- Camille RIGAUX ( fils )
à Fismes,
- l'abbé FONTAINE,
curé de Savigny sur Ardres,
qui les a conduits dans une grotte souterraine, puis au château
du comte TIRANT DE BURY,
- Paul QUÉNOT qui les a transportés chez Armand
GRASER à Damery,
puis chez les MOUSSÉ à Cuisles par Chatillon,
- Edmond MOUSSÉ, qui les a
transférés chez Amédée
VIZENEUX à Baslieux sur
Chatillon, chez qui ils étaient ravitaillés
par Madeleine REMI et où Ian ROBB, ayant contracté
la grippe, a été soigné par le docteur
Clément MAROT de Châtillon
sur Marne.
- Paul QUÉNOT à nouveau qui les a amenés 21, rue Marlot à Reims, chez Renée
WEIGEL. Dans
l'appartement de Madame WEIGEL
se rendaient son amie Lucienne MARMOT, Marcel TAVERNIER, boucher de
la rue des Romains qui l'approvisionnait en viande du marché
noir, Conrad LAFLEUR, le radio
du commandant POTIER, et sa " vigie ", Raymonde BEURÉ. Malade, Ian ROBB y a été
soigné par le docteur BETTINGER.
Vers le 9 décembre
1943, Raymonde BEURÉ est
venue les chercher et les a conduits jusqu'à la gare de Reims,
où ils ont retrouvé LAFLEUR,
ainsi que deux sergents de la RAF, HARPER et BAKER. Ils se sont tous rendus
à Fismes par le train.
En 1944, le capitaine LEFORT, chargé
d'enquêter sur les arrestations de Fismes, notait : « À
Fismes, la moitié du pays savait que des visiteurs alliés
y étaient cachés et à Reims même, trop
de personnes étaient au courant de l'organisation ».
D'autres facteurs doivent encore être pris en compte :
- la naïveté ou l'inconscience qui ont conduit
certains Marnais, ayant accepté de coopérer avec des
réseaux d'évasion sans bien en mesurer les enjeux
ni les dangers, à commettre des imprudences,
à trop parler, parfois simplement par vantardise ;
- l'insouciance de certains pilotes hébergés
à Reims et de résistants, souvent très
jeunes, qui prenaient le risque, la nuit venue, de venir se détendre
dans les bars de la place d'Erlon, fréquentés par
des officiers et des soldats allemands, comme l'atteste le récit
de Ian ROBB.
Il faut enfin évoquer, même s'ils
ont été l'exception, les marchandages
qui ont parfois retardé, compliqué les opérations
d'évacuation, et augmenté les risques.
POTIER disposait
en effet d'importantes sommes d'argent pour réussir sa mission, car en tout temps, l'argent reste
le nerf de la guerre. Les groupes de résistance, ainsi que
les personnes qui convoyaient et hébergeaient les équipages
alliés ne l'ignoraient pas et cela n'a pas manqué,
en ces temps de restriction extrême, de susciter des convoitises et des conflits d'intérêt.
C'est ainsi que dans un message adressé à Londres le 30 octobre 1943, POTIER fait état des exigences d'un groupe de résistance
qui demandait 10 000 francs pour chacun
des quatre pilotes de la RAF que cette organisation avait
récupérés et que le réseau Possum se
proposait d'évacuer vers l'Angleterre.
Quant au commandant POTIER,
il est difficile de croire que c'est par négligence ou amateurisme
qu'il a décidé de rester dans sa chambre d'hôtel
après l'incident de la rue Lesage. Les différents
rapports concernant la descente de la Gestapo rue Lesage à
Reims sont divergents, parfois
même contradictoires. Le
principal protagoniste, le radio canadien LAFLEUR,
en a donné lui-même des versions
successives assez différentes. On peut cependant
penser que, si LAFLEUR et Raymonde
BEURÉ, avant d'aller se cacher à Amiens
aussitôt après, lui avaient rapporté exactement
ce qui s'était passé lors de la descente de la Gestapo
rue Lesage, POTIER n'aurait
pas pris le risque de rester dans la chambre d'hôtel que Raymonde
avait réservée pour lui.
Le manque de cloisonnement
et le cumul des fonctions
Dans
l'état actuel de mes recherches, il me semble aussi que l'on
n'a pas suffisamment pris en compte l'absence
de cloisonnement ou pour le moins, le
manque de cloisonnement entre les nombreux réseaux
et groupes de résistance qui opéraient dans la Marne.
Les recruteurs de ces réseaux et de ces
organisations faisaient appel souvent aux
mêmes acteurs, de bonne foi et probablement sans
le savoir, tant étaient peu nombreuses les personnes qui
acceptaient de risquer leur vie dans une telle entreprise.
Il n'est donc pas rare d'y trouver successivement ou simultanément, les
mêmes agents, utilisant les
mêmes radios, les mêmes
terrains de parachutage ou de ramassage, fréquentant
ensemble ou séparément les mêmes bars et restaurants, voyageant ensemble, tout cela au mépris des règles élémentaires
de sécurité.
Michel PICHARD, chef
régional du BOA, a dénoncé
ce manque de cloisonnement dans
la Marne en prenant précisément l'exemple
de l'arrondissement de Reims et le secteur de Fismes :
À
Reims, c'est le capitaine Bertin, ingénieur, responsable
départemental de CDLR, qui avait d'abord pris en main les
opérations de parachutage de ce secteur, ceci après
l'arrestation du Docteur Quentin.
Il semble qu'il existait malheureusement un lien
entre cette organisation CDLR de Reims et le réseau Hector,
fondé en 1941 par le colonel Heurteaux.
Ce réseau qui avait eu des liens étroits
avec le mouvement Ceux de la Libération avait déjà
connu bien des vicissitudes dans les départements voisins
de la Marne où il était le plus fortement implanté,
c'est-à-dire, l'Aisne, la Seine et Marne et l'Aube.
CDLR avait absorbé, dans le secteur de
Reims, ce qui restait du réseau Hector, et c'est sans doute
ce qui explique quelques arrestations survenues parmi les équipiers
du BOA de Reims avant même le début des parachutages
[
]
Pour le secteur de Fismes, il apparaît que
le groupe d'abord animé par Labdant commit la grave erreur
d'ignorer presque totalement les règles de cloisonnement
: peut-être rattaché à Ceux de la Résistance
( CDLR ), il fut en rapport avec le réseau SOE Prosper, le
BOA et le réseau de récupération d'aviateurs
Possum. Ça fait beaucoup
et il y eut beaucoup de casse.
Le réseau d'évasion Possum,
lorsqu'il s'est installé dans la région de Fismes, est donc bien entré en contact avec
une organisation préexistante, issue du réseau Hector, et liée au circuit CND-Castille-CDLR-BOA-Armée
secrète, implantée dès
1940-1941 dans le secteur de Gueux-Fismes.
Ses équipes récupéraient, stockaient et cachaient
des armes, des munitions des explosifs reçus par parachutage.
Elles se chargeaient également de récupérer
et de cacher des pilotes alliés.
C'est le groupe de Fismes
qui a organisé un parachutage auquel le radio
de Possum, LAFLEUR a participé au cours de la nuit
du 20 au 21 août 1943. Les armes et les explosifs
contenus dans les containers ont été entreposés
à Arcis le Ponsart, puis
ce dépôt ayant été repéré,
amenés à Fismes.
Après l'arrestation le 5 octobre 1943 du chef du
groupe de Fismes, Lucien LABDANT,
armes, munitions et explosifs ont été encore déplacés,
et finalement emmenés à Reims dans un camion par le lieutenant FFI, Louis
PAILLARD. Son chauffeur arrêté en même
temps que lui le 22 décembre 1943,
a hélas parlé.
En août 1943, lorsque le réseau Possum s'implante dans la Marne, les groupes de
Résistance de Gueux et de Fismes sont placés sous l'autorité du capitaine
Henri BERTIN, ingénieur à la Compagnie
d'électricité de Reims, qui est à la fois :
- le chef départemental de l'Armée
secrète,
- le chef départemental de Ceux
de la Résistance ( CDLR ),
- et le chef départemental du BOA,
tout en appartenant également :
- à la Confrérie
Notre Dame-Castille, réseau de renseignement créé
par le colonel REMY,
- au SR Giraud,
ancien Service de renseignements du ministère de l'Air du
gouvernement de Vichy, très lié à Ceux de la Libération ( CDLL ),
- et aussi, selon PICHARD,
à l'Organisation de Résistance
de l'Armée ( ORA ), qui bénéficie
de parachutages d'armes provenant du SOE, au terme de l'accord signé
à Alger en février 1943 par le général GIRAUD et le chef du SOE, le major-général
GUBBINS.
En outre, BERTIN est également en contact avec Pierre
HENTIC, chef des opérations
aériennes et maritimes
du réseau Jade-Fitzroy, réseau travaillant
pour l'Intelligence Service,
auquel appartiennent les Rémois Marcel FALALA et Raymond POUPART, membre du Front national de lutte pour l'indépendance de la France.
Lorsque HENTIC vient superviser des opérations de pick-up dans
le secteur de Reims, il est hébergé
chez BERTIN qui lui présente le chef de Possum, POTIER.
Au début du mois novembre 1943, il accepte d'évacuer par mer plusieurs pilotes pris
en charge par le réseau Possum, en utilisant la filière bretonne qu'il a mise en place dans le Finistère Nord sur l'Aber
Wrac'h ( ou Aber Varc'h ).
Quelques jours plus tard, Pierre HENTIC, dirige une opération
de ramassage dans la Marne, sur
un terrain proposé par le chef du
BOA dans l'arrondissement de Reims, André
SCHNEITER, situé près de la Ferme de Montazin, entre Savigny sur Ardres et Jonchery
sur Vesle. Ce terrain n'étant pas homologué par la
RAF, Pierre HENTIC vient sur
place vérifier qu'il présente bien « les
conditions requises », et rencontre à cette occasion son ami LAFLEUR, l'opérateur-radio de Possum. .
Au cours de la nuit du
11 au 12 novembre 1943, dans le cadre de l'opération Salvia, un double pick-up par avions Lysander emmène en Angleterre Henri BERTIN,
recherché par la Gestapo, Pierre
HENTIC et deux autres membres de Jade-Fitzroy,
ainsi qu' un responsable de Résistance
Fer et son épouse. Selon Hervé CHABAUD, son grand-père, Alfred
CHABAUD, agent du réseau Brutus-Nord, qui
devait faire partie du ramassage, a laissé sa place à BERTIN.
L'utilisation par Possum d'une autre filière d'évasion par mer, le réseau Shelburn, dont le nom est parfois
orthographié avec un e ( Shelburne ), est plus difficile à établir. Sur les certificats
d'appartenance délivrés après la guerre en
faveur de plusieurs résistants marnais qui ont travaillé
pour le réseau Possum et dans les dossiers de plusieurs Combattants volontaires de la
Résistance ( CVR ), on trouve bien le nom de Possum associé à celui de Shelburn.
Cependant cette association
Possum-Shelburn(e) pose problème. En effet, le réseau
d'évasion Shelburn(e) a été mis en
place en Bretagne fin
1943-début 1944, par deux agents franco-canadiens
du SOE, Raymond LABROSSE et Lucien
DUMAIS, à Plouha dans les Côtes du Nord, sur le site de l'Anse
Cochat dont le nom de code était Plage
Bonaparte.
Ce réseau qui utilisait des vedettes
rapides MGB ( Motor Gun Boats ) de la Royal Navy guidées par David BIRKIN,
le père de l'actrice Jane BIRKIN, a effectué son premier
transport réussi dans
la nuit du 28 janvier au 29 janvier 1944, c'est-à-dire
un mois après l'arrestation du commandant
POTIER et la chute de Possum.
Il est toutefois possible qu'à
l'insu de POTIER rappelé à Londres de la mi-novembre à la mi-décembre,
des contacts se soient établis
entre la Résistance marnaise, les équipiers de POTIER,
en particulier Conrad LAFLEUR,
et les deux agents du SOE chargés de mettre en place le réseau Shelburn(e) en Bretagne, lorsqu'ils
ont été déposés par l'avion qui a ramené POTIER à Londres, et qu'ils
ont été pris en charge par
l'équipe de réception de Fismes dans
la nuit du 16 au 17 novembre.
Il est tout à fait vraisemblable que Conrad
LAFLEUR connaissait au moins l'un de ces deux agents
canadiens, Lucien DUMAIS, qui
avait appartenu au même régiment et qui, comme lui, était un rescapé
du raid sur Dieppe d'août
1942. Il est donc possible que des pilotes pris en charge
par Possum, seuls ou mélangés
à des pilotes récupérés par des organisations
de résistance marnaises travaillant pour l'Intelligence
Service et/ou le BOA, aient été acheminés
et hébergés en Bretagne pendant l'absence de POTIER, avant de pouvoir être
évacués en janvier 1944,
par le réseau Shelburn(e).
En tout cas, le nom de Possum est bien gravé sur le monument commémoratif "
À la gloire de tous les réseaux d'évasion ",
érigé en haut de la falaise qui surplombe la plage
Bonaparte et où une plaque commémorative rappelle.
Le
Monument de Plouha qui surplombe la plage Bonaparte comporte une
plaque qui rappelle dans quelles conditions se sont effectuées
les évasions par mer
( Avec l'aimable autorisation de Jacques Pèquèriau )
Les
opérations clandestines à la Plage
Bonaparte comme à d'autres entre
St Cast et l'Aber Vrac'h furent
effectuées en 1942-44 par des canonnières
à moteur appartenant à la Flotille
15 MGB de la Royal Navy de la base
navale de Dartmouth |
On retrouve aussi cette appartenance à Shelburn(e) dans plusieurs dossiers
CVR de membres du groupe CDLR de Châlons-sur-Marne ou groupe Tritant,
qui lui-même était en contact avec les équipes
du sous-réseau SOE Juggler ou Robin-Buckmaster, au cours de l'été 1943,
dans des opérations de parachutages, de constitution de dépôts
d'armes et de récupération des horaires des trains
allemands.
Presque tous les membres de ce sous-réseau implanté dans le secteur de Châlons sur Marne et de Vitry le François, et auquel se rattachait
le groupe de La Fournière, ont été arrêtés en juillet 1943.
On a déjà relaté à plusieurs reprises les liens entretenus par l'opérateur-radio canadien de Possum, Conrad LAFLEUR, avec d'autres réseaux relevant de l'Intelligence Service ( Jade-Fitzroy ), du SOE ( Shelburne ), ou de la France libre ( Confrérie Notre-Dame-Castille, BOA ).
On peut ajouter que le Bar-Restaurant-Hôtel de la Paix à Reims, dont LAFLEUR était un habitué, était en partie réquisitionné par les Allemands et hébergeait régulièrement dans le même temps résistants et agents de passage, avec la complicité de son propriétaire et des serveuses. S'y retrouvaient outre LAFLEUR, le chef de la Résistance marnaise Henri BERTIN, dont on a déjà évoqué les appartenances et responsabilités multiples, et un certain « capitaine BENOIT », qui correspond au pseudo de Benjamin COWBURN, le chef du réseau SOE Tinker implanté dans l'Aube.
Dans le récit-témoignage de son interrogatoire par WEISENSEE le chef de la Gestapo de Reims le 3 janvier 1944, Suzanne LACOMBE, déclare ue ce dernier a sorti de son tiroir une grande feuille et qu'il lui a énuméré « une vingtaine de noms » désignant des camarades affiliés aux réseaux Possum, Turma-Vengeance, Hurteaux-Hector : « Je suis atterrée d'apprendre ainsi, sans aucun doute, qu'ils savent tout de notre activité clandestine [...] ».
On pourrait multiplier ainsi les exemples sur
le manque de cloisonnement entre les différents réseaux
et groupes de résistance, les appartenances multiples, le
cumul des fonctions et des responsabilités, qui
peuvent sans doute s'expliquer par la faiblesse en effectifs et
en cadres, mais qui ont coûté très
cher.
Fin 1943-début 1944, la Résistance marnaise a été
véritablement décimée par les arrestations.
Les arrestations en chaîne
dans la Marne
Le chef du groupe CDLR de Châlons, Robert TRITANT, dont les équipes de sabotage étaient en rapport avec celles du sous-réseau SOE Juggler-Robin, est arrêté le 6 septembre 1943 et torturé. Condamné à mort, il sera fusillé le 6 mai 1944.
Le gendarme Lucien LABDANT, arrêté à Fismes le 5 octobre 1943 est déporté à Buchenwald, puis transféré
à Mauthausen.
À partir de la
mi-novembre 1943, les arrestations
se multiplient, frappant d'abord le
groupe CDLR de l'arrondissement d'Épernay, dont
beaucoup de membres sont fusillés ou déportés.
Mais la Gestapo ne réussit pas à s'emparer de son
chef, Pierre SERVAGNAT, qui avait
quitté son domicile.
Robert de VOGÜÉ,
directeur de la maison de champagne Moët et Chandon et délégué
général du CIVC est arrêté le 24 novembre 1943,
ainsi que d'autres responsables du groupe
Ceux de la Libération (
CDLL ) d'Épernay. Interné à Châlons
dans la cellule voisine de celle de Robert
TRITANT, de VOGÜÉ parle et lui expose dans le détail son activité
dans la Résistance, sans prendre garde que des micros avaient
été dissimulés dans sa cellule.
Condamnés à mort par un tribunal
militaire allemand, Robert de VOGÜÉ et ses adjoints Henri FIGNEROL et Maurice GERMAIN sont condamnés à mort, graciés à
la suite de multiples interventions et transférés
dans des prisons allemandes.
René HERR et Léon LEROY, condamnés
à mort en même temps qu'eux sont fusillés le 22 mars 1944.
Le 6 décembre 1943, Fernande SERVAGNAT est arrêtée
et déportée à Ravensbrück.
Le 7 décembre, plusieurs responsables
FTPF de Reims sont arrêtés
à Reims. Raoul
CHOLLET se donne la mort dans les locaux de la Gestapo
en avalant une capsule de cyanure. Son gendre, Roland
MORET, ainsi que Raoul
MATHIEU et Charles
TASSERIT sont fusillés le 6 juin 1944. Roger
TASSERIT, fils
de Charles, est déporté à
Buchenwald.
Le chef régional
des FTPF, Marcel MÉJECAZE,
est arrêté le
9 décembre et déporté
à Natzweiller-Struthof..
Le
14 décembre, Jean-Jacques
GOGUEL qui avait remplacé Henri
BERTIN comme chef départemental de la Résistance,
est arrêté à
son tour et déporté à
Neuengamme.
Le
15 décembre 1943, Frère
BIRIN de CDLL,
est arrêté dans sa salle de classe à Épernay,
ncarcéré à Châlons-sur-Marne, puis transféré
à Compiègne et déporté à Buchenwald-Dora.
Le 20 décembre, André LACOMBE, sous-chef
du dépôt SNCF de Reims, et son épouse Suzanne,
tous les deux membres des réseaux
Hector, Turma-Vengeance et Possum, sont arrêtés
à Reims. André est transféré à Compiègne, déporté à Neuengamme, et affecté
au Kommando de Fallersleben-Laagberg. Suzanne est internée
à la prison de Reims,
transférée à la citadelle
de Laon, puis au Fort de Romainville,
et déportée à Sarrebrück
Neue Bremm, puis à Ravensbrück et affectée au Kommando de Schönefeld-Leipzig,
où elle perd la vision complète de l'il droit
à la suite des mauvais traitements imposés par les
SS.
Le 22 décembre
1943, le lieutenant Louis PAILLARD, officier du génie affecté à la reconstruction sous contrôle allemand des ponts détruits en 1940, et son chauffeur André GRUSON sont arrêtés au Château de la Malle à Saint-Brice dans la banlieue de Reims, où son unité est installée. Un émetteur radio y a été détecté par un véhicule de repérage, entraînant une intervention de la police allemande. Le chauffeur de PAILLARD parle. Les camionnettes mises à la disposition de cette unité de génie servent à transporter des armes pour la Résistance dans le secteur de Reims et de Fismes. Déporté
à Neuengamme, Louis PAILLARD ne survivra pas aux marches de la mort qui ont précédé la libération du camp. André GRUSON, déporté à Buchenwald sera transféré à Mauthausen et gazé au Château d'Hartheim.
Le 28 décembre vers 8 heures 30, un industriel rémois, Jacques DÉTRÉ, adjoint du chef départemental des
FFI, est arrêté à Reims 10, place Godinot, dans le bureau qu'il occupe au siège de l'Union patronale textile. Il est torturé
à mort dans les locaux de la Gestapo. Selon sa famille, Jacques DÉTRÉ aurait appartenu à un réseau britannique SOE, il était en relation avec les équipes BOA mises en place par Henri BERTIN, et il avait été tenu informé de son transfert en Angleterre par Lysander organisé par Pierre HENTIC. Le 27 décembre, il avait participé à une réunion clandestine en présence du délégué militaire régional André SCHOCK, du chef départemental des FFI , Pierre BOUCHEZ, et des deux frères SCHNEITER, Pierre et André. Vers la mi-décembre, Jacques DÉTRÉ avait demandé au lieutenant PAILLARD de transférer un dépôt d'armes caché par le directeur des Filatures de Carignan, Monsieur TROISSIN, dans une maison inhabitée de la rue Hincmar à Reims. Gravement malade, Monsieur TROISSIN parlait dans son délire d'un dépôt d'armes. Jacques DÉTRÉ avait donc décidé de transporter les armes dans l'usine désaffectée de son père, Jean DÉTRÉ, située Chaussée Bocquaine.
Le même jour, Pierre BOUCHEZ, averti par téléphone de l'arrestation de DÉTRÉ par sa secrétaire, échappe de peu aux agents de la Gestapo lancés à ses trousses, de même qu'André SCHNEITER qui, surpris à son domicile, s'enfuit par les toits.
Le 28 décembre également, le groupe CDLR-BOA
de Gueux est décimé par les arrestations de Jules GADIOT, déporté
à Mauthausen, Marcel COUET, déporté à Graz,
Kommando de Mauthausen, Raymond
SIROT et Lucien VELLY, déportés à Buchenwald, Pol PONCELET, déporté
à Mauthausen et gazé au château de Hartheim, Émile SCHMITT, déporté
à Buchenwald. Parmi eux, seuls Lucien
VELLY et Émile SCHMITT
ont survécu à la déportation.
Ces arrestations rapprochées
ou simultanées intervenant le même jour que la descente de la Gestapo au numéro
161 de la rue Lesage à Reims, où le radio de Possum tentait d'établir la liaison avec Londres, donnent l'impression de faire partie
d'une répression organisée,
programmée, préparée par une Gestapo parfaitement informée sur les différentes composantes de
la Résistance marnaise, ses réseaux et
ses responsables. Elles ont connu un tragique rebondissement en
juillet 1944 à Reims,
ce qui nous ramène encore à Possum.
L'abbé Roland FONTAINE recherché activement par la Gestapo dans la Marne après
la chute du réseau Possum,
avait dû quitter précipitamment sa paroisse de Savigny-sur-Ardres au début du mois de janvier 1944. Ce qui est troublant,
c'est que Ian ROBB atteste qu'il
a été témoin de l'interrogatoire
de l'abbé FONTAINE au siège de la Gestapo de Reims alors qu'il y avait été
amené lui-même au début
du mois de janvier, et que l'abbé y a été torturé.
L'abbé
Roland Fontaine, curé de Savigny sur Ardres
( Avec l'aimable autorisation d'Annette Biazot )
L'abbé FONTAINE aurait donc été arrêté,
puis remis en liberté avant
d'aller se réfugier dans les Ardennes à Givonne dont il était
originaire. Le curé de ce village l'avait mis en contact
avec un des chefs de la résistance ardennaise, Henri
VIN, qui l'avait fait entrer au
maquis franco-belge du Banel.
Le 18 juin 1944,
l'abbé FONTAINE a été arrêté par les Allemands, lors de l'attaque de ce maquis par la Wehrmacht, attaque survenue après
que la Résistance française ait été
infiltrée par RMEN,
un agent belge travaillant pour l'Abwehr.
L'abbé FONTAINE a été interné et torturé à
la prison de Charleville, où il a été
interrogé par RMEN.
Le 3 juillet 1944, RMEN s'est rendu à Reims au domicile de Maurice
OGNOIS à qui il s'est présenté sous
le nom de Charles, agent
de l'Intelligence Service, ami
de l'abbé FONTAINE et membre du maquis du Banel. Il lui expliqua que ce maquis était
tombé, que l'abbé FONTAINE,
ayant réussi à s'enfuir, se cachait, et qu'il l'avait
chargé de prendre contact en son
nom avec la Résistance marnaise pour lui proposer
de récupérer une partie du
stock d'armes et d'explosifs du maquis du Banel qui avait,
disait-il, échappé aux recherches des Allemands. En
outre, il lui proposa d'assurer la liaison
entre la Résistance ardennaise et la Résistance marnaise.
Maurice OGNOIS lui répondit qu'il n'était pas habilité à
traiter d'affaires militaires, qu'il devait en référer
à ses chefs dont il ignorait les adresses, et qu'il lui faudrait
plusieurs jours pour prendre contact avec eux. Il proposa donc à RMEN un rendez-vous fixé
au 8 juillet à son domicile.
Le samedi 8 juillet 1944,
en début d'après-midi, cette seconde rencontre avec RMEN eut lieu en présence
de Paul SCHLEISS, responsable
rémois de Libération-Nord,
et d'André SCHNEITER. RMEN se fit passer pour
un résistant condamné à mort par la Gestapo.
Il exhiba des papiers qui l'accréditaient auprès d'eux. André SCHNEITER se présenta
sous son pseudo, André Salavin,
en qualité de chef militaire de la
résistance dans l'arrondissement de Reims. La
discussion s'engagea et porta sur la récupération
des armes et des explosifs du maquis du Banel. Au milieu
de la conversation, la sonnette retentit à la porte. Maurice
OGNOIS alla ouvrir et se trouva en face de quatre agents
de la Gestapo, tandis que dans la pièce, RMEN sortait un revolver et mettait en joue André
SCHNEITER et Paul SCHLEISS.
En même temps qu'André
SCHNEITER et Paul SCHLEISS,
furent arrêtés Maurice OGNOIS, son épouse, Marie-Thérèse, et leur fille Denise,
âgée de 18 ans, que la police allemande est allée chercher sur son lieu de travail, l'atelier Roche.
Le même jour, était également arrêtée la nièce des époux OGNOIS, Jacqueline THIRION. Elle avait hébergé avec ses parents et ses frères dans leur ferme de Prin, près de Savigny-sur-Ardres, des pilotes alliés convoyés par le réseau Possum, qui furent ensuite cachés dans une grotte de Serzy où son père venait les ravitailler chaque nuit. En mai 1944, la Famille THIRION avait également caché Jacques BUSSEL médecin juif de Fismes, qui avait pu s'échapper de la prison de Reims à la faveur d'un bombardement allié.
Ils furent tous transférés à
la prison de Charleville.
Le même jour, un agent de la Gestapo, qui
pourrait être ce même RMEN,
se présenta chez le chanoine HESS à Reims, exhiba
des papiers tamponnés de cachets anglais, et réclama
des armes pour le maquis des Ardennes. Le chanoine ne tomba pas
dans le piège, mais il a été cependant arrêté le lendemain 9 juillet, à
la sortie de la basilique Saint Remi et conduit au siège
de la Gestapo, rue Jeanne d'Arc où il a été torturé. Interrogé
sur ses relations avec l'abbé FONTAINE et la résistance ardennaise, il ne parla pas. Interné à la prison de Reims, puis à Châlons-sur-Marne, Lucien
HESS a été déporté en août 1944 au camp de Natzweiler-Struthof, puis transféré dans la nuit
du 3 au 4 septembre à Dachau,
où il a été libéré le 29 avril.
Le 29 août 1944, André SCHNEITER, Paul
SCHLEISS et Marie-Thérèse
OGNOIS ont fait partie d'un groupe de treize
otages choisis au hasard, ainsi que Henri
MOREAU, chef départemental du BOA dans les Ardennes,
puis dans la Marne. Embarqués dans un fourgon cellulaire,
ils ont été emmenés en dehors de la ville et fusillés en bordure du Bois
de la Rosière, sur le territoire de la commune
de Tournes.
Arrêté en Italie en 1945, Charles-Antoine
RMEN a été condamné
à mort par la Cour de Justice du Loiret et fusillé à Marseille, en 1948.